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Science arabe

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Reconstitution d'une pharmacie traditionnelle

Les sciences arabes se sont épanouies en terres d'Islam entre les VIIIe et XIIIe siècles et répandues par le biais d'une langue écrite peu à peu enrichie dans tout l'empire arabo-musulman, pendant l’« Âge d'or islamique ».

Des traductions, accompagnées de lectures critiques, de la quasi-totalité des ouvrages de l'Antiquité gréco-romaine ont couvert les domaines de la physique, des mathématiques, de l'astronomie, de la géographie, de la botanique et de la médecine. La langue arabe a joué le rôle de langage universel en science pendant plusieurs siècles. L’adjectif « islamique » désigne le cadre culturel dans lequel ces nouvelles sciences sont nées et se sont développées, en grande partie grâce à la bibliothèque de recherche de la maison de la sagesse de Bagdad, fondée par le calife Al-Ma’mûn, dernier des califes mutazilistes.

En parallèle, dès la fin du Xe siècle, de nouveaux instruments et de nouvelles techniques ont commencé à circuler en Europe. Les savants se sont également beaucoup déplacés.

Histoire[modifier | modifier le wikicode]

L'extension du monde musulman[modifier | modifier le wikicode]

A la mort de Mahomet en 632, la péninsule arabique est une zone tampon entre les empires perse et byzantin. Les conquêtes des VIIe et VIIIe siècle vont étendre le monde musulman en Afrique du Nord, en Espagne et en Asie mineure.

L'empire arabe est mis en contact avec plusieurs civilisations : Grèce, Perse, Égypte, Inde, Chine… Les savants arabes se forment au contact des savants de ces régions et en lisant les livres scientifiques de l'Antiquité qu'ils retrouvent.

La quête de l’ ilm (le savoir) « jusqu'en Chine » est présentée par un hadith comme un devoir religieux. La démocratisation de l'utilisation du papier après la bataille de Talas en 751, provoque une véritable révolution culturelle : des milliers d’œuvres sont diffusées jusque dans les plus petites mosquées et madrasas (les écoles coraniques). Elles restent cependant onéreuses, car l'imprimerie à caractères mobiles n'est pas encore inventée.

Une politique volontariste[modifier | modifier le wikicode]

Au IXe siècle, Bagdad devient la capitale intellectuelle de son époque. Un véritable mécénat, alimenté par des califes, des princes et des banquiers, s'organise pour acquérir des manuscrits, créer des bibliothèques et des observatoires, notamment sous le calife Al Mamoun.

De leur côté, les traducteurs s'appuient sur la langue littéraire utilisée en poésie pour exprimer les nouvelles notions philosophiques et scientifiques, que ce soit dans le domaine de l'abstraction ou des perceptions sensorielles.

En raison de l'interdit du doute religieux, les savants arabes se centrent sur des disciplines scientifiques pratiques et concrètes, et ne s'approchent pas de la philosophie. Plusieurs savants (Avicenne, Averroès) auront des démêles avec la justice.

Les Maisons de la Sagesse[modifier | modifier le wikicode]

Miniature du XVIᵉ siècle montrant des astronomes arabes

Les Maisons de la Sagesse étaient des institutions scientifiques, à la fois bibliothèques, centres de traduction, lieux de réunions et centres de recherche. Inspirées de la Bibliothèque d'Alexandrie ou de l'académie Perse al-Kindi, elles sont apparues au IXe siècle et ont été symboles et vecteurs du dynamisme de la science arabe.

La plus ancienne des Maisons de la Sagesse est la Bayt al-Hikma de Bagdad, ou Hizanat al-Ma'mun, fondée par le calife Haroun al-Rachid en 832. Elle restera ouverte au moins jusqu'au Xe siècle, mais ne résistera pas à la destruction des bibliothèques de Bagdad en 1258.

On peut aussi citer la bibliothèque de Cordoue (fondée au Xe siècle), la Maison du Savoir Dar al-Hikma du Caire (fondée en 1004) et la bibliothèque de Fès (fondée au XIV siècle). De nos jours, certaines institutions se veulent dans la lignée des Maisons de la Sagesse médiévales, comme la Beït El-Hikma à Tunis (1983) ou la Maison de la Sagesse de Fès-Grenade (2016).

Déclin et héritage[modifier | modifier le wikicode]

A partir du XIIe siècle, sous l'effet de plusieurs facteurs (invasions mongoles qui détruisent madrassas et bibliothèques, instabilité politique, primauté donné à la tradition face à l'innovation), la science arabe entre en déclin.

Au cours des XIe et XIIe siècles, de nombreux savants européens sont mis en contact avec les connaissances arabes, notamment en Espagne musulmane (Gerbert d'Aurillac) et en Sicile. De nombreux textes sont traduits, principalement en mathématiques et en astronomie. Les chiffres arabes se diffusent en Europe, notamment via les commerçants.

Au XIIIe siècle, les universités françaises et les écrits de Thomas d'Aquin reconnaissent les avancées de la science arabe et contribuent à l'adapter à la pensée chrétienne. Par la suite la redécouverte des sciences grecques et romaines se fera par la traduction des ouvrages arabes effectués aux débuts de l'Empire musulman.

Les observatoires et l'astronomie[modifier | modifier le wikicode]

Constellation du Lièvre par Al-Sufi
Relevé de la position d'une étoile
Dans le cadre central, signe du lion associé au soleil. Dans les vignettes figurent les planètes des cinq sections du signe : Saturne, un genou à terre, en homme noir et barbu, torse nu et hache à la main ; Mercure symbolisé par un scribe, un codex ouvert à la main ; Jupiter, en homme de loi en turban, assis en tailleur ; Vénus, en femme musicienne jouant du luth ; Mars peint en guerrier casqué, sabre levé et tenant une tête décapitée.

Dans le monde islamique, l’astronomie permet de fixer les heures des prières, la direction de La Mecque, le début du Ramadan, et le calendrier des douze mois lunaires.

Les catalogues d’étoiles ont été très populaires, en particulier le Livre des étoiles fixes d’Al-Sufi (en 964) et celui du prince-astronome Ulug Beg au XVe siècle1.

Les astrolabes et les globes célestes offraient une représentation cartographique des étoiles :

  • au centre de l'astrolabe se trouve une grille de coordonnées, qui est un cadre avec des points représentant les étoiles fixes, du pôle nord céleste jusqu’au tropique du Capricorne ;
  • les globes célestes donnent une vision complète du ciel et intègrent l’ensemble des constellations.

Au début du IXe siècle le calife al-Ma ‘mûn crée les premiers observatoires jumeaux, près de Bagdad et dans les faubourgs de Damas.

Au Xe siècle, la dynastie des Bouyides encourage la construction de bâtiments en dur pour abriter des appareils de grande taille, pour les observations solaires et stellaires.

AU XIIIe siècle, c'est dans l'observatoire de Maragha, au nord-est de l'Iran, que furent réalisées les premières tables du mouvement des planètes.

Le dernier grand observatoire en Islam fut celui de Samarcande, fondé au XVe siècle par le prince mongol Ulug Beg.

L'astrologie[modifier | modifier le wikicode]

L'astrologie est alors considérée comme une branche de l’astronomie appliquée2. On consulte les astrologues pour décider du lieu et de la date de la fondation d’une ville, Bagdad ou Le Caire, par exemple.

Elle est utilisée également en médecine : au moment de l'accouchement par exemple, les astrologues établissent l'horoscope du nouveau-né et son amulette.

Un astrologue a rappelé l'influence de la lune sur les marées, bien connue des marins de l'Atlantique. Le mécanisme en reste cependant mystérieux.

Cartographie terrestre[modifier | modifier le wikicode]

Table de l'Europe d'après Ptolémée

C'est la traduction de la Geographia de Claude Ptolémée, écrite au IIe siècle, avec sa liste des coordonnées de quelques 8 000 lieux du monde connu, qui servira de base à la cartographie terrestre médiévale.

Pour en savoir plus, lis l’article : Système de Ptolémée.

Les premières cartes du monde arabo-musulman sont des documents militaires ou administratifs et des projets urbanistiques.

Les cartes de Ptolémée seront améliorées grâce aux découvertes suivantes :

  • la mesure de la circonférence de la Terre commandée par le calife al Ma’mûn, au IXe siècle ;
  • l’établissement de centaines de tables de nouvelles coordonnées géographiques et astronomiques ;
  • l’introduction de la notion de méridien central 0° passant par le Sri Lanka ;
  • le recours à la trigonométrie sphérique au Xe siècle.
  • la réduction de la longueur de la Méditerranée de 10° ;
  • la séparation de l’Inde et de l’Afrique (qui étaient réunies par Ptolémée) ;
  • l’élargissement du monde connu entre 15° et 20° vers l’Est.
Tabula Rogeriana d’Al-Idrîssî, 1154 (réorientée)

La carte du monde d’Al-Idrîssî en 70 feuillets a été commandée au XIIe siècle par Roger II de Sicile.

Des cartes-itinéraires indiquent les étapes de pèlerinage, les relais de poste, les caravansérails ; elles donnent les directions et les distances entre la Mecque et les principales villes de l’empire.

La chimie et l'alchimie[modifier | modifier le wikicode]

Portrait de Geber
Portrait de Geber et de son maitre, publicité Liebig 1929

L’alchimie arabe, qui remonte à la fin de l’antiquité égyptienne, a été transmise par l’école d’Alexandrie. Elle s’intéressait à la transmutation des métaux vils en métaux précieux. Sa pratique était gardée secrète, et transmise de maître à apprenti.

Ses apports sont nombreux :

  • description et classification systématique de plusieurs substances ;
  • perfectionnement des techniques de laboratoire : distillation, sublimation, calcination, mise en solution, cristallisation, fusion, réduction ;
  • applications pratiques en teinturerie, cosmétique (fards et parfums), pharmacie, alimentation (huile et sucre) et hygiène (détergents à base de soude et savons).

Le chimiste le plus célèbre du Moyen Âge islamique est Jabir Ibn Hayyan au VIIIe siècle : son laboratoire se trouvait à Koufa, en Iraq. Il est connu en France sous la forme latinisée de son nom, Geber. Il proclama l'importance de l'expérimentation, devenue la base des techniques et du vocabulaire de laboratoire en Occident. Il ajoute aux quatre éléments « racines de toute chose » (eau, air, terre et feu), le mercure et le soufre. Ses livres ont justifié la quête de la pierre philosophale. Il a découvert l'acide chlorhydrique et l'acide nitrique, et généralisé la distillation et la cristallisation, qui sont devenues les fondements de la chimie moderne.

La mécanique[modifier | modifier le wikicode]

Représentation par David Roberts en 1838

Les moulins à vent et à eau se sont répandus de l’Extrême Orient à l’Espagne, grâce aux mécaniciens musulmans : c'est une nouvelle source d’énergie utilisée pour moudre les céréales et amener l’eau dans les champs ou dans les villes3.

L'invention de la sâqia, actionnée par la force animale, et de la noria, actionnée par la force du courant, permettent d'élever les eaux jusqu’aux terres à irriguer.

Au IXe siècle, le Livre de la mécanique des frères Banou Moussa est un véritable traité d’hydraulique. Ils ont inventé le siphon concentrique simple et double, et la vanne conique servant à contrôler l’écoulement des fluides, qui n’apparaîtront en Occident qu’avec Leonard de Vinci.

Abbas Ibn Firnas est connu pour plusieurs inventions (les verres de lecture, une horloge à eau, une machine à couper les pierres et une sorte de métronome) mais surtout pour son expérimentation des ailes à voler inspirées des ailes d'Icare.

Au XIIIe siècle, l’ingénieur Al-Jazari a inventé les roues à segments dentés, pour un modèle de noria (Livre des appareils mécaniques) et de nombreux automates4.


Médecine et pharmacie[modifier | modifier le wikicode]

La pratique de la médecine islamique médiévale est basée sur les écrits de Galien sur la physiologie humaine : la maladie est provoquée par un déséquilibre dans le tempérament du patient. Les remèdes prescrits peuvent être un aliment, une boisson, une activité physique ou des massages pour rééquilibrer les humeurs5.

Les médecins n'ont le droit de pratiquer qu'après avoir obtenu l’ijaza dans ce domaine, par compagnonnage avec d'autres savants.

Les nombreux hôpitaux accueillent les malades de toute religion ou ethnie. D'après le traité de déontologie publié au IXe siècle par Ishaq bin Ali al-Rohawi, les médecins doivent respecter des obligations envers leurs patients, quelle que soit leur richesse ou leur niveau social6. Les hôpitaux musulmans médiévaux employaient du personnel infirmier de sexe féminin. Les malades contagieux étaient isolés.

Personnalités célèbres[modifier | modifier le wikicode]

Statue d'Averroès à Cordoue
  • Al-Râzî (Rhazès en Occident) donne une des premières descriptions permettant de diagnostiquer la variole et la rougeole7 ;
  • Ibn Sîna (Avicenne en Occident) a publié le Canon de la médecine, ouvrage de référence dans les universités européennes jusqu’au XVIIe siècle8 ;
  • Ibn al-Nafîs découvre le principe de la circulation pulmonaire9 ;
  • le médecin persan Ali Ibn-Abbas al-Majusi a écrit un manuel de médecine et de psychologie10 ;
  • le chirurgien al-Zahrawi11 ;
  • Averroès : le médecin doit maîtriser sept disciplines, l'anatomie, la diététique, la pathologie, la symptomatologie, l'alimentation, l'hygiène et la thérapeutique12.

Chirurgie[modifier | modifier le wikicode]

Instruments de chirurgie
Anatomie de l'oeil

La dissection et l’autopsie, qui étaient courantes à l’école d’Alexandrie, ne sont plus pratiquées sur l'homme. Mais dans le cadre de blessures de guerre, d’accidents ou d’exhumation de cadavres, les médecins ont l'occasion de corriger leurs connaissances théoriques et d'améliorer leur savoir sur l’anatomie et l’ostéologie.

Au XIe siècle, le dernier tome de l'encyclopédie médicale d'Abu al-Quasim décrit plusieurs techniques chirurgicales ainsi que des instruments. Ce traité a été traduit en latin à Tolède, en hébreu à Marseille et en turc13.

Les chirurgiens anesthésient leurs patients à l’aide d’une éponge soporifique imbibée de substances aromatiques et narcotiques avant chaque intervention14. L’éther aurait été synthétisé par Jebbar au VIIIe siècle ; mais c’est Paracelse (1493-1541), connu pour avoir séparé la chimie de l'alchimie, qui définira son mode de préparation et ses propriétés analgésiques.

Les opérations les plus fréquentes sont les calculs rénaux, les hernies et la réimplantation de dents.

L’ophtalmologie fait des progrès considérables en particulier pour la cataracte15, en utilisant une aiguille creuse pour l'extraction par aspiration douce.

Le Traité d'optique d'Ibn al-Haytham (Alhazen), paru en 1021, est connu en Europe sous le nom latin d’Opticae Thesaurus16. Les savants s'intéressent aux lentilles et à la manière dont les instruments coniques dévient et focalisent la lumière. Ils découvrent le processus de réfraction. La lumière existe indépendamment de la vision, elle se meut avec une très grande vitesse finie17. Roger Bacon fut l’un des premiers Européens à prendre conscience de l’importance de cet héritage.

Averroès, dans son Colliget, attribue à la rétine et non au cristallin les propriétés de photorécepteur.

Pharmacie[modifier | modifier le wikicode]

Muhtasib contrôleur du poids des aliments

Des officines sont ouvertes dans les grandes villes et chaque hôpital a son laboratoire pharmaceutique où les préparations sont contrôlées par un inspecteur, le al-muhtasib.

Les pharmaciens disposent d’une très grande variété de composants botaniques, minéraux et animaux, qu'ils analysent selon les quatre qualités habituelles (le froid, le chaud, le sec et l’humide), elles-mêmes graduées en quatre degrés d'intensité.

Ils se basent sur la traduction du De materia medica de Dioscoride qu'ils enrichissent grâce à la diversité géographique des fournisseurs botaniques : dans cet ouvrage, chaque plante est figurée dans sa totalité, de manière stylisée.

Al-Kindî a établi les formules mathématiques permettant de calculer le rapport entre le degré d’intensité des qualités d’un composant et l’effet recherché18.

Un catalogue des médicaments composés a été publié par Ibn Biklârish (1085-1110)19.

Mathématiques[modifier | modifier le wikicode]

Démonstration géométrique du théorème de Pythagore par Abu l-Wafa

Les savants arabo-musulmans ont ajouté une dimension pratique aux travaux théoriques des mathématiciens grecs, en architecture, en comptabilité commerciale et finances du trésor public, en division des héritages et arpentage, en cartographie et en astronomie.


Les mathématiques sont présentées sous une forme versifiée, pour faciliter la mémorisation des formules20.

Références[modifier | modifier le wikicode]

Sources[modifier | modifier le wikicode]

Liens internes[modifier | modifier le wikicode]

Liens externes[modifier | modifier le wikicode]

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