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Oblomov

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Ivan Gontcharov
Une édition anglaise du roman, datant de 1815.

Oblomov (en russe : Обломов) est un roman russe d'Ivan Gontcharov, publié en 1859.

La structure du roman[modifier | modifier le wikicode]

Les critiques considèrent que c'est un roman marqué par plusieurs grandes parties :

  • le réveil d'Oblomov ;
  • la naissance du sentiment amoureux pour Olga ;
  • la mort du sentiment amoureux pour Olga ;
  • le retour d'Oblomov à son sommeil.

Si l'action dure quinze ans, elle peut être assimilée à une journée (aube, journée, crépuscule, soir). Elle peut aussi être rythmée par les saisons : l'hiver représenterait l'hibernation, le printemps l'éveil du sentiment amoureux qui durerait jusqu'à l'automne (mort du sentiment amoureux), puis enfin le retour à l'hiver.

La vie d'Oblomov paraît ainsi naturelle, rythmée par les saisons. Le roman commence d'abord de manière comique avant de laisser place à l'émotion puis à la tristesse. Selon le critique littéraire canadien Northrop Frye, dans la Grèce antique le printemps est en effet associé à l'idylle, l'été au rire et l'automne à la tragédie.

Au début de l'oeuvre, Oblomov rêve du domaine de son enfance de la rue des Pois, puis y retourne quelque peu à la fin, cette fois dans le quartier de Vyborg à Saint-Pétersbourg, vu comme un retour au paradis.

Le genre du roman[modifier | modifier le wikicode]

Oblomov est un roman particulier car mêle des éléments qui sont étrangers au roman, tels que l'idylle, description d'une nature idéale du domaine de son enfance (Oblomovka), monde idéal entouré d'une nature luxuriante. Or le roman se déclenche habituellement par un élément perturbateur qui vient modifier la situation de départ. Il faut remarquer que ce roman n'a pas d'intrigue selon le critique littéraire russe Dmitri Pissarev. S'il y a quelques personnages secondaires qui essayent de profiter d'Oblomov, ces situations ne durent pas et on revient vite à Oblomov comme seul personnage central. Selon Vsevolod Setchkarev, ainsi, cette absence d'intrigue aboutit à un "antiroman d'aventure" critiquant le genre romanesque. Selon Galia Diment, professeur de littérature à l'Université de Washington, il s'agit d'un "anti-Bildungsroman". En effet, le Bildungsroman voit l'évolution d'un enfant ou d'un adolescent vers l'âge adulte (tels qu'Eugène de Rastignac dans Le Père Goriot de Honoré de Balzac par exemple) ; or on a ici affaire à une situation inverse car Oblomov revient dans son divan et ne devient jamais un adulte.

C'est donc un roman psychologique s'intéressant à la personne d'Oblomov. S'il n'y a pas d'intrigue dans le roman, il y a pourtant bel et bien un mouvement de la part d'Oblomov qui quitte son lit puis y retourne (forme de renoncement). S'il évoque le servage et la condition féminine, ce n'est pas pour autant un roman réaliste, ne dénonçant jamais ces questions.

Les sources du roman[modifier | modifier le wikicode]

Les sources occidentales[modifier | modifier le wikicode]

Ce roman s'inspire de la poésie bucolique de la Grèce antique, notamment de Théocrite avec les descriptions idylliques de nature idéale et luxuriante dans le domaine de l'enfance d'Oblomov. Selon le spécialiste allemand de littérature slave Peter Thiergen, le roman Oblomov s'inspire particulièrement de l'écrivain allemand Friedrich von Schiller alors populaire en Russie et de ses Lettres sur l'éducation esthétique de l'homme. Schiller y prône une éducation idéale permettant la pleine réalisation de soi, en se basant sur le coeur et la volonté. Selon Thiergen, Oblomov ne manque pas de coeur et est affecteux avec son ami Stolz et avec Olga ; cependant, il n'a aucune volonté de construire une vie sociale. C'est donc un "homme incomplet fragmentaire", imparfait physiquement et en surpoids, tout comme son nom Oblomov le traduit (issu du terme russe Обломок signifiant "fragment").

Les sources russes[modifier | modifier le wikicode]

Oblomov s'inspire aussi notamment de la tradition orale ancienne russe et du chant épique médiéval appelé byline. En effet, Oblomov s'appelle Ilia Ilitch Oblomov, tout comme Ilia Mouromets, héros de byline qui ne pouvait pas non plus se lever car bloqué par un poêle. Le roman Oblomov s'inspire aussi du conte médiéval du tsar des Pois, vivant dans le royaume imaginaire des Pois ; or Oblomov vit dans la rue des Pois.

L'influence russe moderne principale est certainement Nikolaï Gogol. Dans sa comédie Le Revizor, une galerie de personnages grotesques rendent visite et apportent leurs respects à Khlestakov, tout comme pour Oblomov. Il en est de même dans Les Âmes mortes, où des personnages visitent la maison d'individus grotesques. Manilov de Gogol est un personnage faible rappelant Alexeïev de Gontcharov, tandis que Sobakievitch est un personnage brutal tout comme Tarantiev chez Gontcharov. Enfin, l'évocation d'une ruralité passée et idyllique n'est pas sans rappeler Les Propriétaires d'autrefois de Gogol, avec une même nostalgie pour la province passée et une même anxiété par rapport à l'urbanisation.

Les thèmes du roman[modifier | modifier le wikicode]

La querelle entre occidentalistes et slavophiles[modifier | modifier le wikicode]

À l'époque où le roman est écrit, les intellectuels russes sont divisés entre occidentalistes considérant que la Russie est européenne mais en retard, et les slavophiles considérant la Russie comme spécifique et originale, ne faisant pas partie de l'Europe.

L'interprétation d'un Oblomov fainéant représentant la Russie déclinante face au pragmatisme du personnage Stolz, d'origine allemande et représentant l'Europe, a été faite. Cependant, Stolz doit-il vraiment remplacer Oblomov ? En effet, Oblomov a le mérite d'être un personnage vraiment sympathique ; la Russie doit-elle vraiment se débarrasser des Oblomov charmants du passé ? Par ailleurs, Stolz a une mère russe ; il s'agirait plutôt de voir l'avenir de la Russie dans une synthèse entre les qualités morales russes et pratiques de l'Europe. Cela évoque le contexte d'eurasisme : les Russes seraient eurasiens.

Le servage[modifier | modifier le wikicode]

Le roman a été écrit en 1859 alors que la Russie est face à un débat sur la subsistance du servage qui y sera interdit en 1861. Gontcharov ne condamne pas explicitement le servage car il est d'origine marchande et n'a pas de serfs. On voit cependant dans le roman que Zakhar le serf d'Oblomov se déplace contrairement à celui-ci, ce qui est paradoxal. Stolz constitue le point de vue occidental, considérant que les paysans libres travaillent mieux. Le point de vue de Gontcharov est plus ambigu, portant une certaine nostalgie du passé et une inquiétude par rapport à l'avenir car voit le serf russe vivre dans une situation moins difficile que l'ouvrier en Angleterre à la même époque.

L'oblomovisme[modifier | modifier le wikicode]

Le roman est découvert en 1859 lorsqu'un critique littéraire, Alexandre Dobrolioubov, publie un article intitulé "Qu'est-ce que l'oblomovisme ?". Il crée ainsi le terme "oblomovisme" (oбломовщина), avec une lecture sociologique très politisée : il s'agirait d'une décadence morale et physique affectant la noblesse russe vue comme parasitaire. Il considère ainsi ce roman comme étant un pamphlet contre le servage.

Cependant, d'autres lectures en ont été faites. Un autre critique littéraire, Alexandre Droujinine, perçoit à l'inverse Oblomov comme étant un personnage sympathique et attachant.

On peut établir une lecture psychanalytique du roman : Oblomov préfère épouser sa cuisinière Agafia Matveïevna qui ne cesse de s'occuper de lui comme une mère au lieu d'Olga qui représente l'altérité et la différence. Il revient dans son lit, dans un état quasi fœtal et redevient un enfant dans le ventre de sa mère et non un adulte ; il est désocialisé. Il fusionne absolument avec Agafia Matveïevna comme si c'était sa mère.

L'oblomovisme peut aussi être vu comme une quête de la sagesse. Oblomov renonce à travailler, à faire carrière, à la réussite sociale, ce qui constitue une certaine sagesse s'opposant à la vanité, à la fierté occidentale. Cela rappelle le quiétisme chrétien qui revendique une contemplation du monde et de cette création divine.

Voir aussi[modifier | modifier le wikicode]

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