Tirésias

Une page de Vikidia, l’encyclopédie junior
Aller à la navigation Aller à la recherche
Tirésias apparaît à Ulysse pendant le sacrifice (1780-85), Johann Heinrich Füssli, conservé à Vienne.

Dans la mythologie grecque, Tirésias (en grec ancien : Τειρεσίας / Teiresías) est un devin originaire de la ville de Thèbes. Il est le devin mythologique le plus célèbre aux côtés de Calchas.

Fils du berger Évérès et de la nymphe Chariclo, Tirésias est père de deux filles : Manto et Daphné.

Devin apparaissant dans tous les fragments mythologiques liés à Thèbes, depuis l'époque de Cadmos jusqu'à l'expédition des Épigones : c'est Tirésias qui suggéra de confier le trône de la cité au vainqueur du Sphinx et, plus tard, ses révélations permettront à Œdipe de découvrir le mystère de sa naissance et de ses crimes involontaires. Ce diseur de bonne aventure apparaît également dans le chant XI de l'Odyssée : le héros Ulysse, afin de connaître les circonstances dans lesquelles aura lieu son retour à Ithaque, se rend auprès d'Hadès pour consulter l'esprit de Tirésias.

Aveugle depuis son plus jeune âge, sa cécité aurait été causée par la déesse Athéna (qui l'a puni pour l'avoir surprise pendant qu'elle se baignait) ou Héra (après s'être opposé à elle lors d'un différend au sujet du plaisir sexuel que lui procurait Zeus). Dans les deux cas, sa punition est compensée par le don de savoir lire d'avenir. Dans la seconde version, racontée par l'auteur latin Ovide dans son œuvre des Métamorphoses, Tirésias surprit deux serpents en train de s'accoupler et les sépara en tuant la femelle avec son bâton, ce qui eut pour conséquence de le transformer en femme. Sept ans plus tard, Tirésias surprit à nouveau deux serpents dans les mêmes circonstances, les frappa avec son bâton pour les séparer, tuant cette fois le mâle afin de redevenir un homme. Cette expérience unique a amené Zeus et Héra à se tourner vers lui comme arbitre dans une dispute pour savoir qui éprouvait le plus de plaisir sexuel entre les hommes et les femmes. Lorsqu'il affirma qu'un homme n'éprouvait qu'un dixième du plaisir ressenti par les femmes, Héra, indignée et humiliée, le punit en lui retirant la vue. Zeus lui accorda cependant en retour le don de prophétie et rallongea son espérance de vie.

Le sens essentiel de la figure de Tirésias réside dans son rôle de médiateur : grâce à ses dons prophétiques, il sert d'intermédiaire entre les dieux et les hommes ; En raison de sa condition androgyne, il en fait de même entre les hommes et les femmes ; enfin, pour sa durée de vie exceptionnellement longue, entre les vivants et les morts.

Le personnage réapparaît dans la littérature européenne sous les traits de son double personnage prophète et androgyne depuis l'Œdipe roi de Sophocle (425 av. J.-C.) jusqu'à nos jours.

Don de prophétie[modifier | modifier le wikicode]

Luc Brisson a rassemblé 18 allusions à Tirésias dans des textes classiques et les a classées en trois catégories : la première fait la narration du changement de sexe de Tirésias puis sa rencontre avec Zeus et Héra ; la deuxième raconte la cécité que lui a infligée Athéna ; la troisième, presque intégralement perdue, semble avoir raconté des épisodes malheureux de la vie du devin.

Tirésias était un prêtre de Zeus et il existe plusieurs versions sur les causes de sa cécité :

Le bain d'Athéna[modifier | modifier le wikicode]

Selon la version de Phérécyde de Léros, retransmise via la Bibliothèque d'Apollodore d'Athènes, Tirésias, encore adolescent, aurait surpris Athéna alors qu'elle se baignait nue dans la source de l'Hippocrène, sur le mont Hélicon. La déesse, d'une chasteté à toute épreuve, considéra cette indiscrétion de Tirésias comme une atteinte à sa pudeur et décide de le priver de la vue.

La mère du jeune aveugle, la nymphe Chariclo, se rend auprès d'Athéna et la supplie de redonner la vue à son fils. La déesse, n'ayant pas le pouvoir de défaire l'acte, lui accorde un don en guise de compensation : « alors elle lui purifia les oreilles, et cela lui permit de comprendre parfaitement le langage des oiseaux ; puis elle lui donna un bâton de cornouiller, grâce auquel il marchait comme les gens qui voient. » Athéna lui accorde également une vie plus longue que les autres mortels et le pouvoir de conserver ses dons lorsqu'il sera en enfer.

Cette version du mythe est également présente dans les œuvres de Callimaque et de Nonnos de Panopolis.

Les métamorphoses de Tirésias[modifier | modifier le wikicode]

Gravure de Johann Ulrich Kraus (1655-1719) - Tirésias et les deux serpents, d'après Les Métamorphoses d'Ovide.

Une deuxième version sur l'origine des dons de Tirésias nous est transmise par Ovide. Alors que Tirésias se promenait dans la forêt du mont Cyllène, dans le Péloponnèse, il trouva deux serpents en train de s'accoupler et les tua d'un coup de bâton. Héra, outrée par cet acte barbare, le transforme aussitôt en femme. La jeune femme conserve cette apparence pendant sept ans pendant lesquels elle se marie et obtient une fille, Manto, qui héritera plus tard de son don de prophétie (selon d'autres versions, Tirésias profite de son apparence féminine pour se prostituer). La huitième année, Tirésias surprend à nouveau des serpents en train de s'accoupler. Piétinant le mâle, il peut redevenir un homme.

Au cours d'un débat divin sur l'Olympe, Zeus affirme que les femmes ressentent plus de plaisir que les hommes lors d'un acte sexuel et Héra soutient le contraire. Les dieux demandent alors son avis à Tirésias, qui a vécu les deux expériences. Ce dernier se range du côté de Zeus et répond que les hommes n'éprouvaient qu'un dixième du plaisir ressenti par les femmes. Héra s'offusque et s'empresse de l'aveugler pour punir son impiété. Zeus ne peut s'opposer à la décision de son épouse mais, pour compenser la cécité de Tirésias, il lui offre le don de divination et une longue vie qui durera sept générations.

Dans la Bibliothèque de Pseudo-Apollodore, un récit quasiment identique cite comme source une œuvre perdue d'Hésiode.

Tirésias, jeune femme[modifier | modifier le wikicode]

Une dernière version raconte que Tirésias serait née du sexe féminin et que, par sa grande beauté, elle suscita le désir d'Apollon. Le dieu, en échange de ses faveurs, lui apprit la musique. En mûrissant, la jeune femme finit néanmoins par rejeter Apollon. Ce dernier la transforme alors en homme afin qu'elle puisse ressentir la sensation d'un désir érotique non assouvi. Dès cette métamorphose et après avoir été l'arbitre du différend opposant Zeus et Héra au sujet du plaisir sexuel, Tirésias ne subira pas moins de six changements d'un sexe à l'autre.

Sources littéraires[modifier | modifier le wikicode]

Tirésias apparaît dans les œuvres littéraires classiques suivantes :

Plus tard, il apparaît également dans :

  • Dante : la Divine Comédie ;
  • John Milton : Le Paradis perdu ;
  • T. S. Eliot : La Terre vaine.
Portail des légendes —  Les mythes, depuis le déluge jusqu'aux extraterrestres.