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Lois électorales pendant la Restauration

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Sous la Restauration, une succession de lois électorales règle les conditions d'exercice du droit de vote des Français. Toutes ces lois reposent sur le système du suffrage censitaire qui réserve le droit de vote aux citoyens les plus riches. Mais en fonction des options politiques du gouvernement, des modifications de la façon de voter permettent de favoriser soit le camp des Ultras, partisans d'un retour à la situation existante avant 1789 (Ancien Régime), pour l'essentiel les anciens nobles et une grande partie du clergé catholique ou bien ceux qui veulent garder les acquis de la Révolution de 1789 c'est-à-dire les bourgeois et les industriels.

Les droits électoraux d'après la Charte constitutionnelle de 1814[modifier | modifier le wikicode]

La Restauration de la monarchie en 1814 puis en 1815 prend en compte que depuis 1789, les Français souhaitent que les lois soient votées par leurs représentants. À côté d'une chambre des pairs dont les membres sont nommés par le roi, est créée une chambre des députés qui sont élus par les Français. Mais tous les Français ne sont pas électeurs ni éligibles. Les femmes sont éliminées du droit de vote car le Code civil les soumet à leur époux qui est le maître dans sa famille.

Reprenant l'idée déjà présente dans la Constitution de 1791 que seuls ceux qui sont instruits et propriétaires (qui donc ont des biens à défendre) sont aptes à gouverner, la Charte réserve le droit de vote aux riches : c'est un suffrage censitaire. De plus, les élus exercent leurs fonctions électives gratuitement ce qui exclut de l'éligibilité ceux qui doivent travailler pour avoir les moyens de vivre.

Comme la richesse provient surtout de la propriété de la terre, ce sont en très grande majorité des propriétaires qui sont électeurs et éligibles. Du coup, il n'y a que 100 000 électeurs et 15 000 éligibles environ (alors qu'il y avait environ 9 millions de Français mâles majeurs).

Le cadre général étant fixé par la Charte, le gouvernement par des lois ordinaires, dont il a seul l'initiative, organise les modalités du vote. C'est là qu'il peut agir pour favoriser l'un ou l'autre camp.

Les premières élections en 1815[modifier | modifier le wikicode]

Pendant l'été 1815, quelques semaines après la chute de Napoléon, ont lieu des élections. Faute de temps, on applique les dispositions complexes imaginées par la Constitution de l'an X voulue par Napoléon, qui visait à affaiblir le caractère démocratique du suffrage universel (uniquement masculin).

Le système est à deux étages. Le gouvernement établit la liste des six cent citoyens les plus imposés de chaque département ; à ce nombre il peut ajouter jusqu'à 20 personnes nommées pour « services rendus ». C'est dans cette liste que les assemblées cantonales (où siègent tous les citoyens, aspect démocratique du système) choisissent les grands électeurs des députés. Leur effectif est fixé en fonction du nombre d'habitants du département. Puis deux semaines plus tard ces grands électeurs élisent parmi eux les députés. Le suffrage est donc censitaire (fondé sur la fortune) puisque seuls les plus riches peuvent devenir électeurs et députés. Pour une population de 30 millions d'habitants, il n'y avait en réalité que 72 000 électeurs réels.

Les élections d'août 1815, ont lieu pendant les violences de la Terreur blanche au cours desquelles les partisans de l'Empire ou de la République étaient pourchassés. Seuls les royalistes participèrent aux élections qui envoyèrent à la chambre des députés 350 ultras sur 398 au total. Plus de la moitié de ces députés appartenaient à la noblesse. Selon le mot du roi Louis XVIII, c'était la « chambre introuvable ». La politique ultra réactionnaire qu'elle mit en place inquiéta le gouvernement et les puissances qui occupaient la France. Elle est dissoute en 1816.

Élections de 1816[modifier | modifier le wikicode]

Il s'agit de remplacer la Chambre introuvable qui vient d'être dissoute par le roi. La situation politique est plus calme. Le nombre des députés est fortement réduit (on passe de près de 400 à moins de 260).

Il y a 136 députés partisans de l'application normale de la Charte qui sont élus. Les ultras sont réduits à 92. L'opposition au régime est représentée par 20 républicains et bonapartistes et 10 députés de la gauche monarchiste.

La loi Lainé de 1817 rétablit le suffrage censitaire[modifier | modifier le wikicode]

L'assemblée élue en 1816 va voter une modification des modalités des élections législatives. C'est la loi Lainé, du nom du ministre de l'Intérieur. Il est prévu que les députés seraient renouvelés par cinquième chaque année (les départements français étaient répartis en cinq séries, et tous les ans une série était soumise à réélection).

Le suffrage censitaire est officiellement rétabli (la très grande majorité des Français ne votent pas). Désormais l'électeur devait être âgé de 30 ans accomplis et de sexe masculin. Il doit jouir de tous ses droits civils. De plus, il doit justifier de 6 mois de résidence dans la commune (c'est ce qui s'appelle alors le domicile politique). Cet électeur doit payer au moins 300 francs de contributions. La liste des électeurs est rendue publique par voie d'affichage. L'électeur reçoit une carte individuelle où sont indiqués le jour et l'heure de la réunion électorale.

Pour être éligible, il faut être âgé d'au moins 40 ans et payer depuis plus d'une année plus de 1000 francs de contributions directes. La liste des éligibles devait être affichée dans la salle de réunion du collège électoral, lors de sa réunion. L'addition des conditions d'impôt minimum à payer et de la population totale des départements font que le département de la Seine avait 9414 électeurs, la Seine-Inférieure (aujourd'hui Sine-Maritime) contenait 3902 électeurs, la Corse 41 électeurs, 8 départements avaient moins de 400 électeurs, seulement 34 département dépassaient les 1000 électeurs.

Les électeurs réunis au chef lieu du département nomment, en trois tours maximum, sur un même bulletin tous les députés du département. Il s'agit donc d'un scrutin de liste (les noms inscrits sur le bulletin sont ceux de personnes d'une même tendance) et non plus un scrutin pour désigner un individu (cette disposition va favoriser l'émergence et l'organisation des courants politiques). Le fait de se réunir au niveau départemental permet d'échapper aux pressions locales de la noblesse et du clergé catholique qui sont supposés favorables aux ultras. Le fait de mélanger le temps du vote aux notabilités rurales et urbaines doit permettre une plus large confrontation des idées et ainsi sortir des petites idées locales. Le fait de devoir loger plusieurs jours au chef-lieu du département doit décourager la venue d'une partie de la noblesse rurale plutôt d'idées ultras et au contraire favoriser la bourgeoisie urbaine habitant sur place et supposée favorable à un gouvernement modéré s'appuyant sur la Charte. De fait, l'abstention était très forte. Dans le département du Nord qui comptait 2103 électeurs en 1817 seuls 439 sont allés voter (mais en 1818 ils étaient 994). Dans le département des Landes seuls 336 des 674 électeurs ont pris part au vote, dans les Basses-Pyrénées) (aujourd'hui Pyrénées Atlantiques, il y eut 83 votant sur 321 électeurs.

Notons que cette loi met en place l'élection des députés au suffrage direct et non plus avec des niveaux comme cela était le cas auparavant.

En 1830, ce système permet à environ 95 000 électeurs de « représenter » le « pays légal » face aux 30 millions de Français (qui sont le « pays réel »).

L'application de la loi ne répond pas aux attentes du gouvernement. À chaque renouvellement partiel annuel , le nombre de députés opposés à la monarchie augmente. Pour les Ultras et même les royalistes modérés, le scandale est maximum quand l'abbé Grégoire, ex-évêque constitutionnel, ancien député à la Convention ayant voté en 1793 la mort du roi Louis XVI, est élu député dans l'Isère en 1819. Aussi le gouvernement songe à modifier la loi pour favoriser ses partisans.

La loi du double vote[modifier | modifier le wikicode]

La modification de la loi électorale est précipitée par l'assassinat du duc de Berry (second dans l'ordre de succession au trône après son père le comte d'Artois (qui sera roi en 1824) le 13 février 1820. Les Ultras en rendent responsable la loi Lainé qui a favorisé les progrès électoraux des adversaires de la dynastie des Bourbons.

Le gouvernement est alors présidé par le duc de Richelieu. Le 30 juin, il parvient à faire voter la loi dite du double vote. Le nombre de députés est augmenté et passe de 258 à 430. La nouveauté importante est que certains électeurs vont voter deux fois. Les députés sont élus en deux temps. Dans un premier temps 258 députés sont élus au scrutin d'arrondissement (une division du département) : ce système remplace l'élection au scrutin départemental de la loi Lainé et est plus favorable aux Ultras qui sont sont en meilleure position pour faire pression sur les électeurs. Puis dans un deuxième temps, le quart des électeurs, ceux qui sont les plus imposés, se réunissent au niveau départemental pour élire 172 députés supplémentaires.

Après le renouvellement annuel de novembre 1820, les résultats sont révélateurs : les Ultras sont désormais 160, les royalistes modérés sont 194 et la gauche libérale, anti dynastique, est réduite à 80 députés.

Progressivement à chaque renouvellement annuel les effets de la loi du double vote renforcent le nombre des députés ultras ou royalistes modérés. D'autant plus que par des mesures d'allègement d'impôt le gouvernement réduit le nombre des électeurs (qui doivent payer un montant minimum d'impôt).

Les élections de 1824 sont un triomphe pour le gouvernement présidé par Villèle. Les ultras obtiennent une majorité écrasante à la chambre qui est alors appelée « la chambre retrouvée » (allusion à la chambre introuvable de 1815). Il n'y a plus que 17 députés de gauche (dont Royer-Collard, Girardin, Benjamin Constant et le général Foy).

En juin 1824, la chambre des députés récemment renouvelée en partie modifie la loi électorale. Désormais les renouvellements partiels annuels sont supprimés. Les élections se feront tous les sept ans en même temps dans tous les départements. La majorité ultra doit donc garder le pouvoir pour de nombreuses années.

Mais dès 1826, le gouvernement doit faire face à une double opposition. La gauche libérale reprend de l'influence dans le pays. Surtout une partie des Ultras (dont Chateaubriand) passent dans l'opposition. En novembre 1827, pour faire face et intimider l'opposition Villèle fait dissoudre la chambre des députés.

Les oppositions s'unissent et triomphent des partisans du gouvernement. Les libéraux ont 180 députés, les ultras dissidents en obtiennent 70 et les ministériels soutiens du gouvernement sont 180. Villèle doit démissionner en janvier 1828. Le roi Charles X nomme un gouvernement composé de royalistes modérés et conservateurs qui tiendra jusqu'en août 1829. Le roi nomme alors un ministère très réactionnaire dirigé par le prince de Polignac. L'opposition se renforçant le roi dissoudra la chambre en juillet 1830, et provoque alors la crise politique qui va aboutir la la révolution de juillet 1830, qui renverse la dynastie des Bourbons.

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