Procès de Louis XVI

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L'ex-roi au moment de son procès.

Le procès de Louis XVI est la comparution de Louis Capet (Louis XVI ex-roi des Français), devant les députés de la Convention nationale pour y être jugé. L'ex-roi, déchu de ses fonctions depuis le 10 août 1792 et retenu prisonnier dans la prison du Temple à Paris, est accusé de 33 faits considérés comme des actes de trahison et de conspiration contre l'État. Longtemps différé par une majorité de députés Girondins, il devient inévitable après la découverte le 20 novembre 1792 de documents compromettants contenus dans l'armoire de fer. Le procès dura du 10 au 26 décembre pour l'interrogatoire de l'accusé, pour l'examen des faits qui lui sont reprochés et la plaidoirie de ses avocats. Aucun témoin de la défense n'est entendu.

Le procès qui débute le 10 décembre 1792 montre une opposition totale entre les conceptions de l'ex-roi (qui depuis juin 1789 ne comprend pas que le souverain est désormais l'ensemble des citoyens et a tout fait pour entraver le déroulement de la Révolution) et les députés qui considèrent que Louis XVI s'est opposé à la volonté du peuple et de ses représentants, et est coupable d'être un roi qu'ils considèrent comme un usurpateur et un rebelle à la volonté populaire.

Le 15 janvier commence le vote explicatif et public des députés pour décider du sort du roi. Quatre questions sont posées : le roi est-il coupable ? Doit-on soumettre le verdict au vote du peuple ? Quelle peine doit-il subir ? Peut-on accorder un sursis pour l'exécution de la peine ? Dès le 15 janvier des députés décident que le roi est coupable. Le lendemain l'appel au peuple est rejeté. La peine de mort sans condition est prononcée par 361 députés, 27 députés sont pour la mort mais avec un report temporaire de l'exécution quelle que soit la peine décidée afin de préserver la paix publique, la mort avec sursis est votée par 44 députés, 290 demandent d'autres punitions, 5 députés s'abstiennent ; une vérification aboutit à comptabiliser 387 députés partisans de la mort réelle. Le 20 janvier à la question portant sur le sursis de l'exécution, 320 députés votent « oui », 380 "non". La peine est donc immédiatement applicable. Le roi fait appel en demandant trois jours pour se préparer à mourir ; mais cette demande est rejetée par la Convention.

Louis Capet est guillotiné le 21 janvier 1793.

Situation de l'ex-roi Louis XVI au moment du procès[modifier | modifier le wikicode]

Depuis le 10 août 1792, Louis XVI est suspendu de ses fonctions de roi des Français par une décision de l'Assemblée législative auprès de laquelle il s'est réfugié. Le roi et sa famille sont détenus dans la prison du Temple à Paris depuis le 13 août. L'Assemblée qui dispose du pouvoir législatif convoque une nouvelle Assemblée constituante afin de rédiger une nouvelle Constitution. Celle-ci devrait prendre en compte l'absence politique du roi qui détenait le pouvoir exécutif d'après la Constitution en vigueur mais qui étant suspendu ne peut plus exercer ses fonctions. Les électeurs, au suffrage universel masculin, pendant l'été 1792 élisent les députés pour cette nouvelle Assemblée, appelée Convention nationale. Les Français qui alors sont allés voter sont pour la plupart des républicains, désirant abolir la monarchie en France. Les députés élus sont donc des républicains convaincus mais de tendances politiques diverses. Selon le principe révolutionnaire établi dès 1789, du fait de leur élection ils représentent collectivement le peuple souverain qui décide comme il le veut de la forme de son gouvernement.

La Convention tient sa première réunion le 20 septembre 1792. Elle décide le 21 septembre d'abolir la royauté en France. Louis XVI est de ce fait réduit au simple rôle de citoyen comme les autres Français : il est désormais appelé Louis Capet.

Faut-il juger l'ex-roi ?[modifier | modifier le wikicode]

Ouverture de l'armoire de fer. Le cadavre de Mirabeau sert à démontrer la corruption par la royauté de l'ancien chef révolutionnaire.

La monarchie étant abolie et la République proclamée, que va-t-on faire de l'ex-roi ? Une grande majorité des députés, en particulier parmi les Girondins pensent qu'il faut attendre le rétablissement de la situation militaire encore incertaine pour décider de son sort. D'autres pensent que le garder prisonnier, donc en vie, c'est encourager les efforts des contre-révolutionnaires de l'intérieur et l'action militaire des souverains étrangers pour libérer l'ex-roi et faire condamner à mort afin de couper les ponts avec l'Ancien Régime et montrer ainsi la détermination des révolutionnaires à faire aboutir les idéaux de la Révolution, en particulier la souveraineté du peuple, l'égalité et la liberté.

Le 1er octobre 1792, la Convention crée une commission de 24 membres chargée de l'inventaire des documents royaux saisis lors de l'attaque du palais des Tuileries le 10 août. Le 6 novembre la commission remet son rapport.

Le 20 novembre on découvre dans un des murs du palais des Tuileries une cache secrète, l'armoire de fer. Les documents qu'on y trouve sont remis au ministre de l'Intérieur le Girondin Rolland. 625 documents révèlent la correspondance secrète du roi et de la reine avec l'archiduc d'Autriche-empereur du Saint-Empire romain germanique. La France étant en guerre avec l'Autriche depuis avril 1792, il s'agit donc d'actes de trahison et de conspiration contre la sûreté de l'État.

Parallèlement le comité de législation de la Convention débat des aspects juridiques d'un éventuel procès de l'ex-roi. Qui jugera-t-on ? Le roi Louis XVI ou le citoyen Louis Capet ? Malgré la proclamation de la République le 22 septembre (donc l'abolition de la royauté) la Constitution votée en 1791 était encore juridiquement en vigueur puisque la nouvelle Constitution est seulement en cours de rédaction. Or dans la Constitution de 1791, il est précisé que la personne du roi est inviolable et sacrée et que seuls les ministres qui contresignent des ordres royaux sont responsables devant l'assemblée.

Les débats houleux sont marqués par les discours de Saint-Just et de Robespierre. Ceux-ci tentent de démontrer qu'il faut se débarrasser du roi pour justifier tout ce qui a été mis en place depuis 1789 et ainsi ne pas désavouer l'action passée des patriotes et des républicains. Leurs arguments convainquent leurs collègues députés puisque le 3 décembre 1792, la Convention nationale décide que Louis XVI sera jugé par elle (représentant le peuple souverain) et non par une juridiction ordinaire déjà existante ou à créer pour la circonstance.

Les charges retenues contre l'ex-roi[modifier | modifier le wikicode]

Le 23 juin 1789, le tiers-état oppose la volonté des représentants du peuple à la volonté royale.

Dès la suspension du roi le 10 août, des commissions d'enquête formées de députés tentent de rassembler des preuves de culpabilité de Louis XVI. Cette recherche est renforcée par la découverte des documents cachés dans l'armoire de fer. C'est à partir de cette base documentaire que l'acte d'accusation est rédigé.

Tout ce qui montre l'attitude contre-révolutionnaire du roi et de son entourage depuis la séance d'ouverture des États généraux en mai 1789 est retenu. Le critère pour juger de l'action contre-révolutionnaire est l'attaque contre la souveraineté du peuple et contre les décisions de ses représentants. Les accusateurs mettent en avant l'idée que le roi a tenté par tous les moyens d'empêcher l'établissement de la souveraineté populaire : tentative pour interdire la réunion des trois ordres dans les débuts des États généraux (séance du 23 juin 1789) ; tentative de dissoudre l'Assemblée nationale par les troupes réunies autour de Paris afin de disperser les députés (journées précédant la prise de la Bastille). Fuite à Varennes en juin 1791 afin de se joindre aux Émigrés et aux troupes étrangères en vue d'une invasion de la France afin de rétablir la monarchie absolue. Pas de protestation de la déclaration de Pilnitz d'août 1791 faite par l'Autriche et la Prusse, texte qui promettait le rétablissement de la monarchie absolue grâce à l'invasion du territoire. S'être opposé à la loi décidant de l'abolition des privilèges (août 1789) qui mettait fin à l'Ancien régime et à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (26 août 1789) qui jetait les bases d'une France égalitaire et de la souveraineté nationale.

L'ex-roi est également accusé d'avoir "fait couler le sang des Français" : mort des insurgés de la Bastille ; n'avoir pas protesté et même d'être l'initiateur de la fusillade du Champs de Mars en juillet 1791 contre les pétitionnaires qui réclamaient la proclamation de la République (en fait c'est Bailly le député-maire de Paris qui décréta la loi martiale et ordonna l'intervention des troupes sous les ordres de La Fayette) ; d'avoir renforcé malgré l'interdiction de l'assemblée Législative la garde suisse qui tira sur le peuple attaquant les Tuileries le 10 août 1792.

On reproche aussi à l'ex-roi de s'être opposé aux décisions des assemblées (La Constituante et la Législative) alors qu'il avait juré pendant la Fête de la Fédération le 14 juillet 1790 d'être fidèle à la Nation et à la Loi. On lui reproche surtout d'avoir mis son veto aux mesures contre les prêtres réfractaires (considérés par les révolutionnaires comme des ennemis de la Révolution). D'avoir financé avec des fonds publics les actions contre-révolutionnaires des Émigrés, d'avoir corrompu des députés (en particulier Mirabeau) de s'être opposé aux mesures contre les contre-révolutionnaires du Midi de la France.

Au total il y a 33 chefs d'accusation contre Louis Capet, l'ex-roi des Français.

Pour en savoir plus, lis l’article : Acte d'accusation contre Louis XVI.

Le procès[modifier | modifier le wikicode]

Une séance du procès. L'ex-roi est en bas à droite. les tribunes de la salle sont bondées

Le 10 décembre l'acte d'accusation est présenté aux députés. Le 11 décembre le roi comparait devant l'assemblée. Le président de la Convention lui lit l'acte d'accusation. Puis le roi doit répondre point par point aux différents points de son accusation. Les justifications du roi sont souvent maladroites, bien que certaines soient pertinentes (certaines décisions du roi étaient reconnues possibles d'après la Constitution de 1791 en vigueur aux moment des faits, par exemples le veto sur les prêtres réfractaires). À sa demande on présente au roi les documents sur lesquels repose l'acte d'accusation, il n'en reconnaît aucun, même ceux portant sa signature et le sceau royal ; il nie l'existence de l'armoire de fer.

Le 12 décembre, l'assemblée accorde au roi le droit de désigner des défenseurs professionnels. L'ex-roi choisit Tronchet ancien bâtonnier de l'ordre des avocats, Malesherbes qui a été deux fois ministre pendant la monarchie absolue et De Sèze ancien magistrat et avocat. C'est surtout ce dernier qui sera le plus actif.

Le 26 décembre, le roi et ses avocats reviennent devant la Convention. De Sèze reprit un par un les 33 chefs d'accusation. Pour lui les faits antérieurs à la Constitution du 3 septembre 1791 rendent le roi irresponsable de ses actes, le roi étant alors en droit un souverain absolu libre de ses décisions et ne devant de compte qu'à Dieu (c'était refuser l'existence de la seule souveraineté du peuple déclarée dès le 23 juin 1789 par les députés, décision qui mettait fin à la monarchie absolue). Pour ce qui est des faits postérieurs à 1791, pour certains d'entre-eux la responsabilité des ministres doit être mise en cause (d'après la Constitution le roi étant irresponsable des actions décidées par le gouvernement seuls les ministres sont responsables devant l'assemblée) or les ministres de l'époque ne sont pas poursuivis. Pour les faits dont le roi serait le seul décideur, ils ne sont pas fondés sur des preuves irréfutables aussi l'avocat plaide non-coupable. Pour l'avocat aucun des faits reprochés à Louis XVI n'est donc valable. C'était évidemment le contraire de ce que pensaient la plupart des députés.

Avant de clore la séance, le roi peut s'exprimer. Il conclut ainsi : « On vient de vous exposer mes moyens de défense, je ne les renouvellerai point ! En vous parlant peut-être pour la dernière fois, je vous déclare que ma conscience ne me reproche rien, et que mes défenseurs ne vous ont dit que la vérité. Je n’ai jamais craint que ma conduite fût examinée publiquement, mais mon cœur est déchiré de trouver dans l’acte d’accusation l’imputation d’avoir voulu répandre le sang du peuple, et surtout que les malheurs du 10 août me soient attribués. J’avoue que les preuves multipliées que j’avais données dans tous les temps de mon amour pour le peuple, et la manière dont je m’étais toujours conduit, me paraissaient devoir prouver que je craignais peu de m’exposer pour épargner son sang, et éloigner à jamais de moi une pareille imputation. »

Le verdict[modifier | modifier le wikicode]

Le vote des député. Le O signifie la mort sans condition

Le 14 janvier 1793, la Convention discute du déroulement des actes aboutissant au verdict. Les discussions sont houleuses. Les députés se mettent d'accord sur les quatre questions :

  1. Louis Capet est-il coupable de conspiration contre la liberté publique et d'attentats contre la sûreté générale de l'État ?
  2. Le jugement de la Convention nationale contre Louis Capet sera-t-il soumis à la ratification du peuple ?
  3. Quelle peine sera infligée à Louis ?
  4. Y aura-t-il un sursis à l'exécution du jugement de Louis Capet ?

Le 15 janvier 1793, les 749 députés votent pour répondre aux deux premières questions. Ils doivent se prononcer nominalement et en public, sous l'œil attentif des personnes présentes dans les tribunes de la salle et commentant bruyamment les votes émis, voir menaçant les hésitants.

À la première question, 718 députés étant présents, 673 votent « oui », 32 font diverses déclarations, 3 ne répondent pas et 10 se récusent ou s'abstiennent.

La culpabilité étant prononcée on passe à la seconde question sur l'appel au peuple. Les députés les plus modérés, mettent en avant la souveraineté populaire, pensent que le peuple (toutes tendances politiques confondues) se montrera plus favorable pour l'ex-souverain et inversera la décision, de plus cela demandera du temps pour organiser un vote dans tout le pays. Cependant la pression des assistants aux délibérations est telle que le résultat du scrutin est : 423 députés sur les 721 présents répondent "NON". 286 ont voté oui, 12 se sont récusés ou abstenus. L'appel est donc rejeté. Désormais il va falloir décider de la peine à appliquer.

Le 17 janvier les députés votent sur la peine. Ils acceptent une proposition (amendement Mailhe) qui prévoit de repousser l'application de la peine quelle qu'elle soit afin de maintenir l'ordre et la tranquillité publics. Puis on passe au vote sur la peine. Sur les 726 députés présents, 361 votent « la mort », 26 députés sont pour la mort mais avec l'amendement Mailhe, 44 « la mort avec sursis », 290 pour d'autres peines, 5 s'abstiennent ou se récusent. Le résultat est peu net (la mort immédiate sans condition ne recueillant qu'une voix de plus que la majorité absolue. Le 18 janvier on procède alors à une vérification, elle donne 361 voix pour la mort immédiate, auxquelles il convient d'ajouter les 26 députés qui ont voté pour la mort mais avec l'application de l'amendement Mailhe ; de ce fait il y a 387 députés qui sont pour la mort « réelle ».

Le 19 janvier une dernière tentative est faite pour ajourner la sentence grâce au sursis. Sur les 690 députés présents 380 députés rejettent le sursis (320 votent « oui », 2 votent sous condition et 10 s'abstiennent ou se récusent).

La sentence doit donc être immédiatement exécutée.

Sources[modifier | modifier le wikicode]

  • [1] - Procès de louis XVI. Article Wikipedia
  • [2] - Votes sur la mort de Louis XVI. Article Wikipedia.
  • [3] - Le procès de Louis XVI. Ministère de la Justice.
  • [4] - Plaidoirie pour le citoyen Capet.Revue générale du droit.
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