Lettre de cachet

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Lettre de cachet pour faire incarcérer, en août 1785, le cardinal de Rohan, un des protagonistes de l'Affaire du collier de la reine.

En France, sous l'Ancien Régime, la lettre de cachet servait à transmettre les décisions du roi pour certaines affaires délicates. La lettre de cachet était signée du roi et contresignée par un ministre. Elle était adressée à une autorité administrative ou judiciaire afin que cette dernière exécute la décision qui y était inscrite. Elle était close par le sceau personnel du roi (contrairement à la lettre patente qui était lisible par tous). La lettre de cachet permettait la rapidité et la discrétion et évitait de « porter sur la place publique » les motifs qui avaient conduits à sa rédaction. Un très grand nombre de lettres de cachet étaient sollicitées par les familles à l'encontre de l'un de leurs membres.

Le système des lettres de cachet a été aboli en mars 1790 par l'Assemblée constituante.

La lettre de cachet un moyen de préserver la sécurité du royaume[modifier | modifier le wikicode]

La lettre de cachet n'a pas obligatoirement un caractère disciplinaire. Elle est la forme normale que prend la correspondance entre le roi et un de ses officiers (fonctionnaires auxquels il a concédé, moyennent finance, une part de son autorité) afin qu'il exécute une décision royale qu'il tenterait d'oublier. C'est souvent le cas lors des crises provoquées par les parlements qui s'opposent à la volonté royale et refusent d'enregistrer les lois voulues par le roi.

Cependant la lettre de cachet est restée connue dans l'histoire comme un moyen disciplinaire et un symbole de l'arbitraire royal. Issue directement de la volonté du roi elle a le nom de lettre de « grand cachet ». La lettre de cachet avec un ordre d'emprisonnement est employée pour éviter toute atteinte à la sécurité du royaume. C'est ainsi qu'en 1661, Nicolas Fouquet le surintendant des finances fut arrêté par D'Artagnan sur ordre de Louis XIV mécontent de l'importance que détenait son ministre. Il fut détenu jusqu'à sa mort en 1680 (?) sans avoir eu le moindre procès. En 1717, Voltaire fut également embastillé, en raison une lettre de cachet, pour avoir écrit un épigramme contre le duc d'Orléans, alors régent du royaume. Il renouvela la triste expérience en 1726, pour avoir défié par les armes, un noble, le chevalier de Rohan qui le méprisait publiquement et avoir ainsi contesté l'organisation sociale du royaume.

La lettre de cachet dans l'intérêt des familles[modifier | modifier le wikicode]

Les lettres de cachet sont sollicitées du roi pour régler des problèmes survenant dans les familles, du moins celles qui ont un accès facile aux bureaux ministériels. On les appelle les « lettres de petit cachet ».

Les motifs des demandes[modifier | modifier le wikicode]

Honoré de Mirabeau, plusieurs fois emprisonné à la demande de son père, afin de calmer sa jeunesse turbulente

Le motif peut être un différend entre voisins, entre commerçants concurrents ; ainsi Voltaire demandera une lettre de cachet contre une commerçante, sa voisine, qui faisait trop de bruit à son goût. Les familles veulent pouvoir se débarrasser de certains de leurs membres qui contestent l'autorité paternelle ou dont la conduite apporte le déshonneur. On peut vouloir faire disparaître, plus ou moins longtemps, une fille qui refuse un mariage arrangé ou un garçon qui souhaiterait épouser une fille de moindre condition et provoquerait ainsi une mésalliance. On peut vouloir soustraire à un procès public déshonorant un garçon ou homme auteur d'une agression sexuelle (cas du marquis de Sade) qui risque un procès et la peine de mort. On peut mettre hors d'état de poursuivre sa conduite jugée frivole un fils de famille qui dilapide sa fortune ou l'héritage familial et qui est couvert de dettes (cas de Mirabeau). Être mis en prison permet d'échapper aux poursuites judiciaires ordinaires.1

Faire la demande d'une lettre de cachet[modifier | modifier le wikicode]

La famille, ou une autorité publique si l'affaire risque de provoquer des troubles dans une communauté locale (l'évêque, le curé, le seigneur du lieu) peuvent demander une lettre de cachet. Pour cela il faut écrire une supplique détaillée à Versailles. À Paris, il existait un bureau des placets qui aidait le public à rédiger la demande.

Les bureaux ministériels demandent une enquête, qui est confiée aux autorités représentants le roi, telles le lieutenant général de police pour Paris ou l'intendant qui représente le roi dans la Généralité. Celui-ci confie l'enquête à son représentant local, tel le subdélégué. Il faut vérifier l'exactitude des faits dénoncés et voir si la famille peut payer les frais de prison, car dans les affaires privées, l'emprisonné reste à la charge de sa famille ; d'ailleurs il peut se faire livrer de la nourriture dans son lieu d'emprisonnement.

L'emprisonnement[modifier | modifier le wikicode]

La prison de la Bastille à Paris

De 1741 à 1775, près de vingt mille lettres de cachet sont expédiées. Le nombre ne cesse d'augmenter au cours du XVIIIe siècle, en particulier à l'approche de la période révolutionnaire où la contestation de l'ordre établi prend de l'ampleur aussi bien dans l'État que dans les familles.

La durée de la détention est variable. Comme il est indiqué dans la lettre de cachet, il faudra un nouvel ordre royal pour que le détenu soit libéré. On peut espérer que les familles rassurées par la « mise au pas » et le « retour à la raison » d'un des leurs récalcitrant feront la demande de libération. Mais ceux qui sont incarcérés pour folie passent en prison le reste de leur existence. Les internés pour raison d'État, dans les cas les plus graves subissent la même peine (par exemple Fouquet). Mais les prisons n'étant pas extensibles, les places sont limitées, surtout celles qui relèvent de la raison d'État, où de plus les frais sont pris en charge par celui-ci. Ces cas ne représentent que moins de 5% des lettres de cachets.

Aussi le gouvernement tente de limiter le temps de détention. En 1784, pendant une période où les caisses du trésor royal sont vides et où on cherche à faire des économies, une circulaire ministérielle fixe une durée de deux années maximum pour ceux dont la remise en liberté ne serait pas susceptible de troubler profondément l'ordre public.

Références[modifier | modifier le wikicode]

  1. À l'époque, outre les victimes des lettres de cachet, seuls sont emprisonnés ceux qui ont des dettes ou les personnes qui attendent leur jugement criminel. Les criminels condamnés sont ou exécutés ou bannis du royaume

Source[modifier | modifier le wikicode]

Source : cette page a été partiellement adaptée de la page Lettre de cachet de Wikipédia.
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