Jachère

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Dans l'agriculture d'autrefois, la jachère 1 était le fait de travailler la terre plusieurs fois au printemps et en été, donc de labourer, sans l'ensemencer tout de suite après. Ces travaux servaient à faire germer les « mauvaises herbes » pour les éliminer au passage suivant. Cela préparait un terrain sans mauvaise herbe pour le cultiver normalement la saison suivante.

Le mot servait aussi à désigner la terre où ces travaux étaient faits.

L'aspect de la jachère était une terre nue, labourée. Des herbes y poussaient à certaines étapes, que l'on pouvait faire pâturer puis elles étaient détruites par le labour suivant.

La jachère ne doit pas être confondue avec la friche, qui est une terre laissée à l'abandon pendant plusieurs années consécutives. La friche peut être pâturée, elle sert par ailleurs de réserve de terres cultivables.

Les objectifs de la jachère[modifier | modifier le wikicode]

Paysan labourant. Dessin du XVIe siècle

Ces labours étaient réalisés pour atteindre trois objectifs. Le premier était de détruire les« mauvaises herbes » (les plantes adventices). Chaque labour détruisait les herbes qui ont poussé et faisait remonter en surface les graines enfouies qui pouvaient désormais pousser avant d'être détruites par le labour suivant ou la chaleur de l’été sur les plantes déracinées. Il s'agissait donc d'un nettoyage du sol.

Le second objectif était d'enfouir le fumier récupéré dans les étables, trop souvent en petite quantité car le paysan n'avait qu'un cheptel réduit qu'il nourrissait difficilement. Le fumier était étendu sur la parcelle ainsi que les excréments des animaux qu'on amenait pâturer sur cette terre.

Le troisième était de permettre la décomposition de la matière organique (voir plus bas). Chaque labour pouvait être suivi de travaux plus légers comme le hersage, l'arrachage manuel des mauvaises herbes … Ces travaux faits, on pouvait semer en automne. La jachère (les travaux) était la « tête d'assolement » sur une parcelle de terrain, elle était suivie l'année suivante par l'ensemencement en blé (froment) plante exigeante et qui était une des bases essentielles de l'alimentation, donc qu'il fallait réussir.

La jachère fertilise-t-elle le sol ?[modifier | modifier le wikicode]

Contrairement à une idée reçue la jachère n'est pas un repos de la terre en vue de sa fertilisation. Les labours, qui aèrent la couche superficielle du sol, accélèrent la minéralisation des matières organiques, ce qui libère des éléments assimilables par les plantes cultivées. L'action de l'azote de l'air permet la nitrification et les mouvements saisonniers des eaux d'infiltration permettent la dissolution et la remontée des éléments minéraux (phosphates et potassium). Mais ce processus est très long, généralement plus long qu'une saison de culture d'une plante sur une parcelle. Il est nécessaire d'apporter du fumier (la matière organique) pour compenser les pertes (sorties) au moment des récoltes des éléments nutritifs stockés dans les plantes cultivées.

La jachère considérée comme de l'espace perdu pour la production[modifier | modifier le wikicode]

Autrefois les paysans désignaient sous trois noms différents l'état d'une même parcelle au cours de l'année. Après le premier labour qui était le commencement d'un nouveau cycle de culture, la parcelle était dite en jachère. Entre la période de semis et celle de la moisson, la parcelle était en culture (en récolte), puis de la moisson au premier labour de jachère (souvent au printemps suivant), la parcelle était en chaumes ou éteules (ou restoubles...). Si on laissait l'herbe pousser dans les chaumes la parcelle devenait une friche ou pâtis, c'est-à-dire une prairie spontanée et temporaire que l'on faisait pâturer.

C'est cette pratique de la jachère que combattirent les physiocrates du XVIII siècle. Faute de connaissances agronomiques suffisantes et pensant que toute la richesse vient de la terre, ils considéraient la jachère (terre non ensemencée pendant un certain temps) comme une aberration économique et sociale dans une période où la disette menaçait périodiquement.

Où pratiquait-on la jachère?[modifier | modifier le wikicode]

La jachère était pratiquée dans toute l’Europe, sauf dans les régions à hivers trop longs ou trop froids qui ne permettaient pas la culture des céréales semées en automne. Il en était de même dans les régions qui disposaient de beaucoup d'engrais comme les banlieues urbaines riches grâce aux déchets provenant des poubelles ou des égouts (les eaux usées). Les terres au bord de la mer peuvent bénéficier de la récupération des algues et du goémon qui sont d'excellents fertilisants. Dans certaines vallées fluviales grâce aux limons apportés lors des inondations on pouvait se dispenser de la jachère. Le tout ne représentait pas plus de 5% des surfaces cultivables. En Bretagne intérieure, à partir du XVIe ou du XVIIe siècle, le sarrasin, qui est une culture d'été, prit la place de la jachère, ce qui permit d'augmenter la nourriture disponible dans ces régions aux sols peu favorables au céréales nobles (le froment).

La jachère aujourd'hui[modifier | modifier le wikicode]

Depuis la révolution agricole du XVIIIe siècle, le mot jachère a progressivement pris un autre sens. Aujourd'hui on appelle jachère une terre qui pourrait produire mais qu’on laisse temporairement à l’abandon le plus souvent pour réduire la production des plantes excédentaires par rapport à la consommation.

Références[modifier | modifier le wikicode]

  1. autres noms de la jachère :guéret ou ses variantes (garat, garach, varette, warect, ...) ; versaine (du latin vertere = retourner) ; sombre et sommard (du gaulois samo = été, cf. l’allemand Sommer et l’anglais summer) ; terre à soleil ; estivade ; cultivage ou cotive ; maggese (de maggio, le mois de mai ; maggiere = donner le premier labour) ; braak et Brache dans les parlers germaniques (brechen = rompre, Brachmonat désigne le mois de juin). D'après Sigaut. 1975

Sources[modifier | modifier le wikicode]

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