Congrès de Tours (1920)

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Le Congrès de Tours se tient du 25 au 30 décembre 1920. Il réunit les délégués des fédérations départementales du parti socialiste SFIO (section française de l'Internationale socialiste).

Le congrès conclue les discussions qui ont eu lieu dans le parti depuis la fin de la Première Guerre mondiale. Discussions où se sont manifestées des critiques violentes contre l'attitude de la SFIO et de la CGT (confédération générale du travail) pendant la guerre. La majorité des délégués décident de rompre avec la IIe Internationale (socialiste) et d'adhérer à l'Internationale communiste (ou Troisième Internationale) fondée en mars 1919 par Lénine le chef bolchevik russe. La minorité socialiste, regroupée autour de Léon Blum, refuse les conditions d'adhésion à l'Internationale communiste et décide de maintenir la SFIO.

Désormais la gauche française est durablement divisée.

Les socialistes français pendant la guerre[modifier | modifier le wikicode]

Depuis 1905, tous les socialistes français sont regroupés dans la SFIO ; les syndicalistes le sont dans la CGT. Jusqu'en 1914, la SFIO défendait l'idée qu'il fallait tout faire pour empêcher une guerre. D'ailleurs pendant la crise de l'été 1914, le leader socialiste Jean Jaurès rencontre les dirigeants des autres partis socialistes européens pour coordonner leurs efforts dans ce but.

Les socialistes se rallient à l'Union sacrée[modifier | modifier le wikicode]

Mais dès le lendemain de l'assassinat de Jaurès fin juillet 1914 et la déclaration de guerre le 2 août, la SFIO renverse ses positions et décident de soutenir l'effort de guerre. Comme la plupart des Français, les socialistes considèrent que la France est dans son droit, que l'Allemagne est l'agresseur et que la guerre sera courte. Trois dirigeants socialistes deviennent ministres dans le gouvernement d'Union sacrée présidé par René Viviani. La CGT renonce à appliquer sa doctrine de la grève générale qui devait paralyser la mobilisation de l'armée française. Certains socialistes et syndicalistes considèrent que leurs organisations politique et syndicale trahissent les intérêts de la classe ouvrière.

La contestation interne de la position officielle de la SFIO[modifier | modifier le wikicode]

La guerre s'éternisant et faisant de plus en plus de morts et de dégâts, la lassitude gagne la population. En 1917, des grèves affectent l'industrie où les conditions de travail sont militarisées. Des mutineries éclatent dans l'armée française après le très sanglant échec de la bataille du Chemin des Dames. La révolution russe de février 1917, l'effondrement militaire de l'armée russe au cours de l'année et enfin la prise du pouvoir par les bolcheviks en novembre 1917, montrent qu'une autre solution est possible pour arrêter les massacres.

En septembre 1915, certains socialistes français, contre la position officielle de leur parti et les menaces gouvernementales, ont pris beaucoup de risque pour rencontrer en Suisse à Zimmerwald des socialistes venus d'autres pays d'Europe (y compris d'Allemagne et d'Autriche-Hongrie). Leurs buts étaient de dénoncer le nationaliste, de revenir à l'idéal internationaliste et de voir par quels moyens on pourrait mettre fin aux hostilités. En avril 1916, une nouvelle conférence a lieu à Kiental (Suisse) sur le même sujet. Ces socialistes appellent à la paix immédiate et sans indemnités ni annexions, la « paix blanche ». Lénine défend le programme de transformer la « guerre impérialiste » en « guerre révolutionnaire » et fonder une nouvelle Internationale. Ces socialistes appellent aussi à faire pression sur les gouvernements au moyen de grèves et de manifestations à travers toute l'Europe.

En France des socialistes de plus en plus nombreux mettent en cause la participation de leur parti au gouvernement. En septembre 1917, les ministres socialistes quittent le gouvernement.

Positions divergentes entre socialistes après la guerre[modifier | modifier le wikicode]

Échecs de la SFIO et de la CGT[modifier | modifier le wikicode]

Après la guerre, la situation politique est défavorable à la SFIO. Aux élections législatives de novembre 1919, la vague bleu horizon des députés de droite lamine le parti socialiste qui perd le tiers de ses députés. Les grèves tournantes organisés dès mars 1919 par la CGT, dans les mines, l'industrie textile, les banques, les chemins de fer et l'industrie métallurgique sont un échec désastreux. 18 000 salariés de cette branche sont licenciés.

Divisions dans la SFIO[modifier | modifier le wikicode]

Ces échecs créent des tensions entre les tendances qui existent dans la SFIO. Les internationalistes zimmerwaldiens prennent progressivement le dessus sur les réformistes. Dès février 1920, la SFIO quitte l'internationale socialiste accusée d'avoir failli à la sauvegarde la paix en 1914 et de s'être discréditée dans la participation à divers gouvernements pendant la guerre. Deux membres de la direction du parti, Marcel Cachin et Louis-Oscar Frossard, en juin 1920, se rendent à Moscou pour assister au congrès de l'Internationale communiste. Très bien reçus, ils en reviennent enthousiasmés. Ils ont reçu pour consigne d'éliminer les membres réformistes et de transformer le fonctionnement du parti en appliquant les conditions d'adhésion à l'Internationale communiste.

En prévisions du congrès qui doit avoir lieu à Tours en décembre 1920, les socialistes français doivent trancher entre deux positions irréconciliables. Les internationalistes, avec pour chefs de file Cachin, Frossard, proposent que le modèle à suivre soit la Russie qui vient de faire la révolution. Pour cela le parti doit être transformé et devenir très centralisé. Il doit être dirigé d'une main de fer par des dirigeants élus, si possible issus de la classe ouvrière et non plus des milieux intellectuels comme c'était le cas dans la SFIO. Une fois la discussion à tous les niveaux terminée, tous les adhérents doivent appliquer les décisions du parti. C'est le « centralisme démocratique ». Le parti ne doit pas tolérer les divergences doctrinales. Les opposants à la « ligne » décidée doivent être exclus. Les ouvriers ont le rôle essentiel pour provoquer les évènements qui déboucheront dans la révolution. Le parti doit participer aux élections qui fournissent des moments de propagande généralisée, mais doit refuser de participer au gouvernement et doit se préparer clandestinement à la lutte violente et armée

Les réformateurs, regroupées autour de Léon Blum et de Marcel Sembat sont d'un avis diamétralement opposé. Pour eux la Russie ne peut être le modèle à suivre. Le succès des bolcheviks est dû à des conditions locales (en particulier l'extrême faiblesse des classes moyennes et la sous politisation du monde rural russe). On ne peut transposer la situation russe à la France. Le parti ne peut être centralisé, cette militarisation des adhérents est contraire aux traditions du mouvement socialiste français (où l'anarchisme est encore très présent en particulier dans les milieux syndicaux). Il est impensable d'exclure les opposants aux décisions prises par le parti. Le parti doit s'adresser à tous les travailleurs (ouvriers agricoles, très petits paysans, employés, ouvriers). Les adhérents doivent provenir de tous les milieux. Le parti doit refuser la lutte armée pour la conquête du pouvoir. C'est par les élections gagnées dans le cadre de la démocratie parlementaire que l'on pourra faire les réformes qui modifieront les conditions de travail et de vie des salariés. Les conditions d'adhésion à l'Internationale communiste sont donc inacceptables.

Une troisième voie est proposée par Jean Longuet, un militant internationaliste très actif pendant la guerre, on peut adhérer à l'internationale mais certaines conditions d'adhésion (il y en a 21) sont à renégocier.

Le congrès[modifier | modifier le wikicode]

Les délégués qui sont présents à Tours ont reçu un mandat impératif pour le vote décisif. La très grande majorité des socialistes français veut l'adhésion à l'Internationale communiste. Les derniers échanges entre les tendances sont houleux, violents et vont jusqu'à l'insulte.

Pendant le congrès la communication d'un télégramme envoyé par la direction de l'Internationale communiste Zinoviev, Lénine, Trotsky, qui exige par avance l'exclusion de Jean Longuet (le petit-fils de Karl Marx !), fait que les longuétistes rallient les réformateurs de Blum.

Le Congrès socialiste vote en faveur de l’adhésion à la IIIe Internationale par 3 208 pour et 1 022 contre. La division de la SFIO est décidée. La majorité crée la SFIC (section française de l'Internationale communiste). Frossard est élu secrétaire général. Le nouveau parti récupère le journal l'Humanité (fondé par Jaurès) qui devient l'organe officiel du parti (en 1921, la SFIC devient le parti communiste)

La SFIO subsiste avec environ un tiers de ses adhérents soit 30 000. Blum en devient le chef de file. La plus grande partie des élus (dans les conseils municipaux, les départements et les assemblées parlementaires) restent à la SFIO.

En 1921 le syndicat de la CGT se divise également. Mais dans ce cas seule une minorité de militants rejoint le camp communiste et fondent la CGTU (CGT Unitaire).

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