Autriche-Hongrie

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Autriche-Hongrie
(de) Österreichisch-Ungarische Monarchie
(hu) Osztrák–Magyar Monarchia
1867 - 1918
Drapeau Blason
Drapeau Blason
Carte de l'Autriche-Hongrie. En rouge, l'empire d'Autriche ; en vert le royaume de Hongrie ; en jaune la Bosnie-Herzégovine.
Carte de l'Autriche-Hongrie. En rouge, l'empire d'Autriche ; en vert le royaume de Hongrie ; en jaune la Bosnie-Herzégovine.
Informations générales
Régime Monarchie constitutionnelle
Capitale Vienne et Budapest
Langue Allemand et hongrois (officielles)
tchèque, polonais, ukrainien, italien, slovène, croate, serbe, slovaque et roumain (langues minoritaires)
Monnaie Florin austro-hongrois (jusqu'en 1892)
Couronne austro-hongroise (à partir de 1892)
Religion Catholicisme
Démographie et superficie
Population 52 800 000
Superficie 676 615 km2
Entités précédentes :
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L'Autriche-Hongrie est un ancien pays d'Europe centrale, ayant existé de 1867 à 1918. Il était composé de l'empire d'Autriche (appelé Cisleithanie) , et du royaume de Hongrie (appelé Transleithanie) . Ces deux pays avaient le même souverain l'empereur-roi François-Joseph Ier d'Autriche, puis son petit-neveu et successeur Charles Ier d'Autriche (Charles IV en Hongrie). Cette double monarchie repose sur le dualisme austro-hongrois élaboré par un compromis en 1867, entre l'empereur et les représentants des Hongrois, la minorité la plus importante de ses possessions. La Bosnie-Herzégovine, ancien territoire de l'empire turc ottoman, administrée depuis 1878 par l'Autriche est annexée en 1908.

Rejoignant la Triple-Alliance avec l'Allemagne et l'Italie, le pays participe à la Première Guerre mondiale en menant une série d'offensives en Russie, dans les Balkans et en Italie. Le manque de réformes internes, l'issue défavorable du conflit pour les empires centraux et le développement des mouvements nationalistes conduisent à son effondrement après la guerre, et à son partage par de nouveaux États indépendants suivant le principe d'autodétermination.

Histoire[modifier | modifier le wikicode]

Contexte[modifier | modifier le wikicode]

Pour en savoir plus, lis les articles : Printemps des peuples, Nationalisme, Unification italienne et Unification allemande.

La formation de l'Autriche-Hongrie découle de la chute du Saint-Empire romain germanique, et des ambitions nationalistes et expansionnistes de l'Empire d'Autriche (les Habsbourg) et la Prusse (les Hohenzollern)1. Après l'effondrement du Premier Empire napoléonien, la Confédération germanique est fondée en 1815, lors du congrès de Vienne2. Elle regroupe une multitude de territoires de langue allemande comme la Bavière ou la Saxe, ainsi que la Prusse et l'Autriche, qui y exerce un rôle dominant. Un conflit oppose alors ces deux pays sur la répartition du territoire, l'Autriche détenant la majorité du pouvoir et la Prusse désirant renforcer son influence.

Le développement des mouvements nationalistes et du concept de l'État-nation sont particulièrement forts en Prusse, où un mouvement d'opposition se forme appellant à la formation d'un État allemand unifié3. À partir de 1830, la « question allemande » divise les milieux germanophones sur l'incorporation des territoires autrichiens au sein d'un pays allemand uni, le pouvoir étant majoritairement exercé par l'Autriche en cas d'accord avec la Prusse (solution « grande-allemande ») et par la Prusse en cas de refus sans l'Autriche (solution « petite-allemande »)45. Dans le même temps, les minorités ethniques de la Confédération sont conquises par une volonté d'affirmation de leur identité à partir du début du XIXe siècle, comme les Hongrois et les Tchèques67. Lors du printemps des peuples de 1848, ces derniers obtiennent respectivement un droit de représentation au Parlement et la promesse d'une Constitution autonome68. Cependant, l'adoption de la solution excluant l'Autriche d'un État allemand unifié par le nouveau parlement fédéral de Francfort9, amène au renforcement du poids de la Prusse entamé depuis 1834 et l'union douanière la favorisant10.

Cela laisse l'opportunité pour la Prusse de s'aggrandir au détriment de ses voisins. Les États allemands du sud craignent néanmoins l'expansion prussienne, alors que celle-ci compte sur la réorganisation de son armée pour réaliser son unification et affabilir l'Autriche11. De son côté, l'Autriche est affaiblie par une sévère crise économique et par la concurrence commerciale et l'opposition politique hongroises, la population résistant pacifiquement à l'hégémonie autrichienne et le transport fluvial et le réseau ferroviaire se développent12. Sur le plan religieux, le concordat conclu en 1855 n'atténue pas les tensions entre conservateurs et libéraux, ceux-ci s'opposant à son application. La religion s'installe alors comme sujet du débat politique, entre évêques majoritairement conservateurs et laïcs libéraux13.

La répression issue du printemps des peuples, qui se traduit par la fermeture des journaux indépendants, le découpage arbitraire de la Hongrie et des terres tchèques, et la dissolution des Diètes, ainsi que la concentration extrême du pouvoir autour de l'empereur François-Joseph Ier, marque une période néo-absolutiste se déroulant de 1852 à 1859. C'est durant cette période que l'Empire connaît un fort essor économique ainsi que la modernisation de son administration, mais la germanisation forcée renforce les ambitions nationalistes des minorités ethniques14.

Fonctionnant de façon centralisée depuis la répression des révolutions de 1848, l'Empire se retrouve contesté de l'intérieur et ses ambitions nationalistes sont menacées en Italie et en Prusse15. L'échec de sa politique étrangère est marquée par le détournement de la Russie, alliée traditionnelle de l'Autriche, en raison de sa passivité durant la guerre de Crimée (1854), et au rapprochement russe avec la France et le Royaume-Uni14. Au cours des décennies 1850-1860, une série de guerres vont être menées par ces puissances opposées aux intérêts autrichiens, à commencer par l'Italie. Avec le soutien de l'empereur des Français Napoléon III et forte de sa réorganisation, l'armée piémontaise enhardie par le chef du gouvernement et figure du nationalisme italien Camillo Cavour, mène plusieurs batailles contre les Autrichiens et remporte les victoires décisives de Magenta (4 juin 1859), et Solférino (24 juin 1859). Ces derniers, sous-équipés, sont contraints de céder la Lombardie et conduit au rattachement de plusieurs provinces au royaume de Piémont-Sardaigne, ainsi qu'à l'annexion de Nice et de la Savoie par la France en échange de son aide militaire. L'unification italienne (en italien Risorgimento) s'opère en 1861, par la fondation du royaume d'Italie, et se poursuit le restant de la décennie16. Dans le même temps, sous l'impulsion du nouveau chancelier Otto von Bismarck, une série de guerres est menée par la Prusse dans les territoires voisins pour renforcer son influence et réunir toutes les populations de langue allemande en un seul État (pangermanisme), au désavantage de l'Autriche. La participation de l'Autriche, au côté de la Prusse, au partage des duchés danois en 1864, n'engendre qu'un point de tensions qui sera utilisé par la Prusse comme prétexte pour envahir à son tour les duchés sous contrôle autrichien, en 1866. La victoire acquise à Sadowa (3 juillet 1866) amène au traité de Prague, qui assure la domination de la Prusse sur l'Autriche à travers la dissolution de la Confédération germanique (auquelle l'Autriche jouait un rôle important) et son remplacement par la Confédération de l'Allemagne du Nord17.

Le bilan est désastreux pour les Autrichiens : l'armée est épuisée, le pays isolé sur la scène européenne (la Russie hostile depuis la guerre de Crimée, le Royaume-Uni et la France peu impliqués dans la cause autrichienne), et les Prussiens s'assurent désormais la majeure partie des terres allemandes18.

Formation[modifier | modifier le wikicode]

Pour en savoir plus, lis l’article : Compromis austro-hongrois.

À partir de 1860, des négociations ont lieu avec les Hongrois sur l'accordement d'un statut d'autonomie, mais les droits proposés par les Autrichiens sont perçus comme insuffisants et les responsables hongrois refusent de participer aux réunions du parlement autrichien. Des mesures énergiques semblables à la période néo-absolutiste sont alors prises pour soumettre l'opposition, mais la situation n'aboutit pas en raison de leur résistance et du refus d'appliquer les lois autrichiennes14.

Après un blocage, les défaites de l'Autriche contre la Prusse l'amènent à se recentrer sur sa situation interne. Les négociations avec les Hongrois reprennent et aboutissent à un compromis, le 18 février 1867 : il unit l'empire d'Autriche et le royaume de Hongrie en un seul État (alors nommé l'Autriche-Hongrie), tout en leur accordant chacun une large autonomie. Ils disposent chacun d'un Parlement distinct, tout en étant gouvernés par un même souverain et disposant de ministères communs19. Si il règle temporairement les querelles entre Autrichiens et Hongrois, il n'affaiblit pas les volontés autonomistes des minorités ethniques présentes au sein du royaume royaume, qui sont alors placées sous la domination de l'Autriche (Tchèques, Italiens, Croates...) et de la Hongrie (Roumains, Serbes...)20. Censé être temporaire, il constituera la base du système impérial jusqu'à sa chute.

XIXe siècle (1867-1900)[modifier | modifier le wikicode]

Modernisation de la société[modifier | modifier le wikicode]

Pour en savoir plus, lis les articles : Belle Époque et Vienne (Autriche).

En 1868, un accord est signé entre la Hongrie et le royaume de Croatie-Slavonie, qui lui accorde une administration autonome dirigée par un ban au sein de la monarchie hongroise. La minorité croate sort insatisfaite de l'accord, restant liée à l'Autriche-Hongrie21. En 1878, suivant la guerre russo-turque et le congrès de Berlin qui redéfinit les frontières dans les Balkans, l'administration de la Bosnie-Herzégovine est confiée à l'Autriche-Hongrie, renforçant les révoltes dans la région22.

La première décennie est marquée par la croissance économique, avec le développement de l'industrie, ainsi que la modernisation de la société23. L'édification du réseau de chemin de fer, concentré autour des villes de Vienne, Budapest et Trieste et privatisé à la veille du compromis austro-hongrois, s'étend au Tyrol, à la Bosnie24, à la Voïvodine (aujourd'hui nord de la Serbie)25 et à la Galicie26. Des liaisons ferroviaires sont mises en place avec la Serbie et jusqu'à Constantinople (via l'Orient-Express)2728. L'exploitation du lin de Bohême29 et des ressources minières (fer, charbon...) provoque une diversification de l'économie, jusque-là tournée vers l'agriculture30. La Hongrie développe son industrie agricole, et exporte son sucre et ses produits sidérurgiques6.

Parallèlement, une transformation de la société s'opère en pleine période de la Belle Époque : une élite se forme dans le milieu du commerce31, une refonte de l'architecture a lieu et des mouvements d'émigration apparaissent dans tout l'Empire. Des minorités ethniques (comme les Tchèques) s'installent massivement sur des portions du territoire et y apportent leurs traditions20. L'enseignement libéral se développe et la bourgeoisie perd de son influence, et un essor culturel se propage dans les grandes villes : des courants littéraires spécifiques à chaque communauté linguistique émergent, et des académies artistiques et scientifiques réputées sont rénovées et attirent sur le territoire. La marine est renforcée et retrouve sa renommée. La ville de Vienne devient le symbole du développement artistique de l'Autriche-Hongrie, la modernisation de son architecture inspirant plusieurs villes de l'Empire, et sa vie culturelle provoquant le rayonnement du pays dans toute l'Europe32.

L'importance des minorités ethniques s'accroit dans l'administration : les Tchèques dominent au Parlement régional de Bohême, des sièges représentant les intérêts croates et polonais sont fondés au sein du Parlement hongrois, et l'administration militaire et gouvernementale voit arriver des membres de toutes les minorités (Polonais, Roumains, Croates, Tchèques...)3320. La gestion de ces minorités est cependant bien différente d'un territoire à l'autre, l'Autriche étant perçue comme plus tolérante que la Hongrie, qui appliquait une sévère politique de magyarisation. La question nationale y était également plus importante, peu de droits restant octroyés aux minorités et le poids du nationalisme hongrois était majeur, jusqu'à former l'opposition au Parlement. Celle-ci dénonçait les ministères communs et réclamait davantage d'autonomie34.

Politique intérieure et étrangère[modifier | modifier le wikicode]

Pour en savoir plus, lis les articles : Question d'Orient et Deuxième Internationale.

La politique étrangère n'est que peu abordée pendant la première décennie d'existence de l'Autriche-Hongrie, et la politique intérieure se concentre sur les relations entre l'Autriche et la Hongrie et la place des minorités ethniques35. Des réformes apportées au suffrage permettent d'élargir le droit de vote à près de l'ensemble du corps électoral autrichien à la fin du siècle, alors qu'il est resté très restreint en Hongrie jusqu'à la chute de l'Empire, les responsables politiques hongrois craignant une hausse de la proportion d'électeurs des minorités ethniques par rapport aux Hongrois34. Après la fondation de l'Autriche-Hongrie, le mouvement ouvrier gagne en importance sous l'influence de la crise économique de 1873, malgré la répression. En 1893, le congrès fondateur de la Commission syndicale de l'Empire permet l'unification de tous les mouvements syndicaux. Les responsables ouvriers obtiennent davantage de droits à partir de 1895, se voyant accorder le droit de vote au côté des socialistes36. Une modernisation de la vie politique s'opère à la fin du siècle, avec la création de nouveaux partis (principalement antisémites et pangermanistes) et la perte d'influence des partis traditionnels30.

Ce n'est qu'à partir de l'occupation de la Bosnie-Herzégovine, en 1878, que le pays acquirt un certain poids régional, axé sur un système d'alliance. En 1879, l'Autriche-Hongrie signe d'abord une alliance avec l'Allemagne37, faisant front commun contre la Russie, et impose sa politique économique à la Serbie. Cette dernière devient dépendante des Austro-Hongrois dans les années 1880, alimentant l'hostilité de la population et le nationalisme serbe38. L'Autriche-Hongrie craint les ambitions expansionnistes de la Serbie, désireuse d'intégrer tous les peuples slaves du sud des Balkans, incluant les Croates, Slovènes et Bosniaques sous administration autrichienne15. Le pays s'implique fortement dans la « question d'Orient », en visant à contenir l'influence russe (pays se proclamant protecteur des peuples slaves) dans la région39. Le 20 mai 1882, par crainte d'une guerre avec la France en Afrique du Nord, l'Italie signe un accord d'assistance militaire avec l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie, formant la Triple-Alliance. Principalement tournée à l'encontre de la France, elle est également dirigée contre la Russie40.

Jusqu'à la fin du siècle, l'armée austro-hongroise ne fait pas globalement l'objet de projet de mobilisation. Elle comporte un équipement moderne, bien que la communication soit compliquée par la diversité linguistique et que la plupart des effectifs soient des volontaires41. Le refus de la Hongrie d'hausser les financements alloués ne permet initialement pas à la marine de se moderniser42. Durant toute son existence, les possessions de l'Autriche-Hongrie au-delà de son territoire national seront pratiquement inexistantes, se limitant à quelques territoires en Chine. L'importance de son commerce fut très faible, entrant en concurrence avec les colonies allemandes43. À la fin du siècle, pendant l'essor de la révolution industrielle, une modernisation de la marine s'effectue par l'augmentation du calibre des armes ainsi que de nouvelles stratégies, qui repensent la guerre sous-marine. En Autriche-Hongrie, l'équipement est produit dans les usines industrielles et sidérurgiques de Silésie et de Bohême. Les ports de Pola (aujourd'hui Pula en Croatie) et de Trieste (aujourd'hui en Italie) deviennent les principales bases navales de l'Empire44.

XXe siècle (1900-1914)[modifier | modifier le wikicode]

Jusqu'à la Première Guerre mondiale[modifier | modifier le wikicode]

Pour en savoir plus, lis les articles : Course aux armements et Guerres balkaniques.

Au début du siècle, face au développement des milieux nationalistes, apparaissent des projets de réformes destinées à préserver le pays d'un effondrement, tout en prenant en compte les caractéristiques des minorités ethniques en matière de langue et de culture. Ainsi, une série de compromis menés à travers tout le pays repensent les rapports qu'entretiennent les peuples majoritaires avec les minorités. En Moravie, le Parlement et les circonscriptions électorales sont divisés en deux groupes ethniques, représentant l'un la population allemande et l'autre les Tchèques, permettant une stricte représentation des deux peuples et une gestion autonome des affaires20. En 1910, les peuples allemand, polonais, roumain et ruthène concluent un accord, prévoyant une gestion collective de leurs intérêts. En Hongrie, la politique unitaire adoptée par le gouvernement conduit au rejet des demandes autonomistes des minorités, à l'exception de la Croatie depuis 1868. L'idée d'une triple-monarchie intégrant les Tchèques, ou d'une fédération englobant les Slaves (émise en 1906 par l'homme politique Aurel Popovici), gagne en importance45.

Parallèlement aux projets de réforme territoriale, une tardive modernisation de la marine est menée à partir de 1910, marquée par d'importants financements alloués pour renforcer la marine, ainsi que par l'élargissement du cours du Danube44.

Le 5 octobre 1908, le nouveau gouvernement nationaliste des Jeunes-Turcs, dans l'Empire ottoman, inquiète l'Autriche qui craint la réaction des Ottomans dans les Balkans. La situation est perçue comme menaçante en Serbie, qui est dirigée par des panslavistes russophiles depuis 1903. Le jour-même, après la conclusion d'accords secrets avec la Russie et l'Empire ottoman, l'Autriche annexe la Bosnie-Herzégovine, provoquant l'épisode de la crise bosniaque. Face au fait accompli, les Serbes et les Russes protestent, les Ottomans décrètent un boycott des produits austro-hongrois, et les tensions d'aggravent entre l'Autriche-Hongrie d'une part, la Russie et la Serbie de l'autre. Profitant de la situation, la Bulgarie proclame son indépendance, propageant la crise à l'ensemble des Balkans4647. Les guerres balkaniques de 1912-1913, auxquelles l'Autriche-Hongrie permet l'affaiblissement de la Serbie en permettant l'indépendance de l'Albanie qui coupe l'accès à la mer pour les Serbes48, constituent le prélude de la Première Guerre mondiale.

À la veille de la guerre, en 1914, l'Autriche-Hongrie est un grand État multiethnique, regroupant une dizaine de peuples dans ce qui constitue le troisième plus grand pays d'Europe49. Elle est désormais un important pays industriel, ferroviaire et agricole, et sa marine est la sixième plus importante du continent50. L'armée est forte d'environ 1,8 million de soldats51, ce qui en fait cependant l'armée la plus faible de toutes les puissances européennes. Elle est alors composée d'une armée régulière unifiée, accompagnée d'armées propres à l'Autriche et à la Hongrie (la Landwehr et la Honvéd) puis de milices autonomes de volontaires (le Landsturm)52.

Première Guerre mondiale (1914-1918)[modifier | modifier le wikicode]

Le 28 juin 1914, le prince-héritier au trône austro-hongrois François Ferdinand et son épouse Sophie Chotek sont assassinés par un jeune nationaliste serbe de Bosnie appelé Gavrilo Princip, lors d'une visite organisée à Sarajevo, en Bosnie. La date, choisie en l'honneur d'une défaite serbe au Kosovo au XIVe siècle, est alors perçue comme une provocation en plus du lieu retenu, point de tensions dans la région. L'évènement, débouchant d'abord sur l'envoi d'un ultimatum par l'Autriche-Hongrie à la Serbie puis à son rejet par cette dernière, précipite le déclenchement de la Première Guerre mondiale46.

Le pays s'engage dans la guerre au côté de l'Allemagne, en déclarant la guerre à la Serbie le 28 juillet 191453, puis à la Russie le 6 août54. L'essentiel des effectifs sont mobilisés dans les Balkans contre la Serbie, et à l'est contre la Russie. Face aux troupes serbes fortes de 300 000 soldats55 mais épuisées par les guerres balkaniques, trois armées austro-hongroises (constituant plus de 700 000 soldats) sont envoyées. Les premières batailles sont bien plus difficiles que prévues pour l'Autriche-Hongrie, la coordination des forces serbes permettant l'arrêt de la progression adverse sur la rivière Drina (sur la frontière serbo-bosniaque), et la mort de 25 000 soldats austro-hongrois fin août 1914. Un autre affrontement eut lieu début septembre près des monts Gučevo (ouest de la Serbie) et Mačkov Kamen (centre), qui se termine par une victoire serbe. Les Serbes profitent de l'affaiblissement de leur adversaire pour avancer jusqu'aux environs de Sarajevo, en octobre 1914, avant d'être contraints de se retirer en raison d'un manque d'effectifs. Une nouvelle offensive austro-hongroise, début novembre, permet la prise de Belgrade, mais l'arrivée de renforts français permet aux Serbes de regagner l'ensemble du territoire conquis, en décembre 191456.

Sur le front russe, la situation tourne d'abord au désavantage pour les forces austro-hongroises : les erreurs stratégiques du commandement militaire ont retardé l'achèvement de la mobilisation57, et facilitent la percée des troupes russes en Galicie (nord-est de l'Autriche-Hongrie). En novembre 1914, les forces russes s'emparent de Lviv et se trouvent aux portes de Cracovie et de la Hongrie. L'avancée russe provoque un exode massif de la population et du personnel administratif, qui sont accueillis à Vienne avec hostilité et sans aide externe58. Sous l'impulsion des généraux allemands, une contre-offensive d'ampleur est menée à partir de mai jusqu'en septembre 1915, qui permet la reprise de la Galicie et l'occupation de la Pologne et d'une partie des pays baltes59. Parallèlement, une poignée de soldats austro-hongrois sont envoyés en France et en Belgique combattre à Ypres et Verdun, et recevoir une formation militaire60.

Après un calme d'un an, la Serbie subit la riposte de l'Autriche-Hongrie, aidée de l'Allemagne et de la Bulgarie en octobre 1915, entrée en guerre dans l'espoir de se voir attribuer des territoires. Le manque de munitions contraint l'armée serbe à entamer un repli dans le sud du pays, puis à se retirer par la mer pour se redéployer en Grèce5661. Le front des Balkans et de l'est ne change ainsi plus jusqu'à la fin de la guerre.

Jusque mi-1918, l'Autriche-Hongrie n'est que peu impactée par les évènements extérieurs (révolution russe) et son armée parvient à maintenir une structure unie, même après la crise politique naissant avec la mort de l'empereur François-Joseph. Son successeur, Charles, a toujours été opposé à la guerre et place ses espoirs dans la négociation de la paix, pour tenter de préserver le pays de l'effondrement62. Les négociations tournent cependant rapidement court, en raison des exigences italiennes d'annexion de plusieurs provinces et de la méfiance de l'empereur allemand Guillaume II62. En octobre 1917, dans ce qui constitue sa dernière percée de la guerre, l'Autriche-Hongrie avec la participation de l'armée allemande repousse les Italiens, lors de la bataille de Caporetto. L'armée austro-hongroise, grandement affaiblie par les pertes, n'est dès-lors plus en mesure de mener ses propres offensives et devient dépendante de l'Allemagne63.

En avril 1918, la divulgation dans la presse des négociations de paix secrètement entamées par l'empereur Charles ruinent sa réputation, et accentue les opinions indépendantistes64. En septembre 1918, le front balkanique s'effondre par la poussée des forces franco-serbo-grecques qui arrivent à Belgrade et Bucarest. Parallèlement, les Allemands reculent à l'ouest, et l'armistice est signé par les Bulgares (29 septembre) et les Ottomans (30 octobre)65. En octobre, les troupes austro-hongroises se retirent d'Italie lors de la bataille de Vittorio Veneto, et les minorités ethniques déclarent une à une leur indépendance : la Hongrie, la Croatie et la Slovénie le 25 octobre, suivi de la Tchécoslovaquie le 28 octobre66 et de la Pologne le 11 novembre67. Le gouvernement autrichien signe l'armistice le 3 novembre, puis la Hongrie à son tour le 1168.

Disparition de l'Autriche-Hongrie et traités de paix[modifier | modifier le wikicode]

Les États héritiers de l'Autriche-Hongrie.

L'Empire austro-hongrois perd la Première Guerre mondiale. Selon le principe des nationalités et du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, l'empire est partagé entre sept États. Les traités de Saint-Germain-en-Laye (septembre 1919) et de Trianon (juin 1920) organisent le nouveau partage de l'Europe centrale.

Administration[modifier | modifier le wikicode]

Pour en savoir plus, lis l’article : Compromis austro-hongrois.

L'Autriche et la Hongrie étaient indépendantes l'une de l'autre pour leurs affaires intérieures. Elles avaient en commun un gouvernement central chargé des Affaires étrangères, de la Guerre et des Finances. Elles se mettaient d'accord pour les douanes, les chemins de fer, la monnaie, mais l'accord devait être renouvelé tous les dix ans. Les assemblées représentatives de chacun des pays étaient représentées auprès de l'empereur-roi par des Délégations. Les autres minorités (Tchèques, Croates, Roumains, Polonais, Slovaques...) de l'Empire étaient tenues à l'écart de la gestion du pays.

L'empire d'Autriche, essentiellement peuplé de population germanique, développe son industrie et adopte des mesures politiques qui le rapproche des pays d'Europe occidentale (suffrage universel masculin, mesures sociales ...). Par contre, le royaume de Hongrie est dominé par la noblesse terrienne hongroise (les Magyars ou Hongrois), qui développe surtout l'agriculture et réprime les minorités non-hongroises.

Un pays multi-ethnique et multi-religieux[modifier | modifier le wikicode]

Composition ethnique de l'Autriche-Hongrie.

Les terres composant l'Autriche-Hongrie ont été rassemblées au cours des siècles par la dynastie de Habsbourg. Des peuples d'origines, de religions et de cultures différentes y cohabitent.

Les Allemands forment 23 % de la population totale, les Hongrois (Magyars) sont 19,6 %. Les nombreuses minorités slaves regroupent 45 % de la population totale. Les Latins (Italiens et Roumains) sont 8 %. Les catholiques forment 90 % de la population totale, mais l'orthodoxie était présente en Roumanie et en Ukraine et l'islam en Bosnie.

À l'exception de plusieurs pays multiethniques proches, comme la Russie, la présence de nombreuses minorités en Autriche-Hongrie ne provoqua que peu de tensions ethniques, une certaine cohésion parvenant à être maintenue et le territoire sera un lieu d'installation des Juifs en provenance de Russie fuyant les pogroms. Cette diversité touche également l'administration publique et l'armée, les ministères et les postes militaires étant dirigés par des membres de nombreuses minorités (principalement les Tchèques)33.

Autriche[modifier | modifier le wikicode]

L'empire d'Autriche rassemble près de 28,5 millions d'habitants sur environ 300 000 km2. Il est essentiellement peuplé par des populations d'origine germanique (en Autriche et Bohême), mais renferme une forte minorité hongroise, une forte minorité tchèque ainsi que des Latins (Istrie et Trentin). L'allemand est la langue officielle.

La population est à 90 % catholique, les protestants sont environ 2% (surtout installés en Bohême). Les Juifs représentent un peu plus de 4 % de la population. Les orthodoxes ne sont qu'un peu plus de 2%.

Hongrie[modifier | modifier le wikicode]

Le royaume est peuplé par 20,8 millions d'habitants qui occupent 324 000 km2. Les Magyars dominent le pays principalement dans la plaine de Pannonie et à l'est de la Transylvanie. Le hongrois est la langue officielle.

La population est surtout catholique (60 %) mais il existe une forte minorité protestante (19 %). Les orthodoxes sont plus de 14% (Roumains). Les juifs sont près de 5%.

Bosnie-Herzégovine[modifier | modifier le wikicode]

Près de 1,9 million d'habitants peuplent les 51 199 km2 de la Bosnie-Herzégovine. Les orthodoxes sont plus de 43 % de la population, les musulmans près de 33 % et les catholiques 23 %.

Références[modifier | modifier le wikicode]

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  2. CONFÉDÉRATION GERMANIQUE : Universalis Junior
  3. Bundestag allemand - Le mouvement unitaire et libéral allemand (1800 - 1848)
  4. Le Vormärz et le mouvement de la Paulskirche (deutschland.de)
  5. L’unification allemande - Histoire à la carte (histoirealacarte.com)
  6. 6,0 6,1 et 6,2 Les nations européennes entre histoire et mémoire, xixe-xxe siècles - Le nationalisme hongrois et les célébrations du millénaire de 1896 - Presses universitaires de Paris Nanterre (openedition.org)
  7. Chronologie sommaire de l'histoire des Pays Tchèques (free.fr)
  8. L’année révolutionnaire 1848 | Radio Prague International
  9. Révolution de 1848 en Allemagne (La) | EHNE
  10. La Reichsbank : une banque de guerre ? | Cairn.info
  11. Allemagne : histoire - LAROUSSE
  12. Le temps des hommes doubles - La Hongrie sous le néoabsolutisme autrichien (1849-1859) - Presses universitaires de Rennes (openedition.org)
  13. Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879 - Chapitre III. L’église et les catholiques - Éditions de la Sorbonne (openedition.org)
  14. 14,0 14,1 et 14,2 Néo-absolutisme et rivalité austro-prussienne (1849-1867) (numericable.fr)
  15. 15,0 et 15,1 Autriche : histoire - LAROUSSE
  16. La France et l'unité italienne (1848-1871) - myMaxicours
  17. histoire de la Confédération d'Allemagne du Nord - l'Europe de la Poste vers 1860 - philatelie et marcophilie - l'histoire postale par la lettre ancienne et le timbre poste (kelibia.fr)
  18. La naissance du Reich - 1866 l’année du destin - Presses Sorbonne Nouvelle (openedition.org)
  19. La naissance de l'Autriche-Hongrie | Le blog de Gallica (bnf.fr)
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  73. ça s'est passé un... - 11 novembre - Herodote.net
  74. Histoire : la Roumanie naissait il y a un siècle (lepoint.fr)
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  76. Les Français en Italie 1917-1918 | Chemins de mémoire (cheminsdememoire.gouv.fr)
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